H.B.

Billet rédigé par Marie Fradette, spécialiste de la littérature jeunesse

Un homme cagoulé, chargé d’explosifs, débarqua dans une classe de maternelle, menaçant d’appuyer sur le détonateur si on ne répondait pas à ses demandes. Dehors, « des hommes, cagoulés de noir eux aussi, montaient sur les toits. Ils dirigeaient leurs fusils vers l’école. Ils étaient prêts à tirer, si on leur en donnait l’ordre. Ainsi, dès le début, il y eut deux histoires ». Celle de l’extérieure, perçue, entendue, ressentie par les parents, les médias, mais aussi celle de cet homme, seul, « prisonnier de [ses] rêves les plus fous, […] mal assis sur une petite chaise de bambin ».

Inspiré de la prise d’otage de Neuilly en 1993, Thierry Lenain raconte ici l’évènement, mais du point de vue d’un homme qui découvre la nouvelle en dépliant son journal. Avant même de penser aux enfants séquestrés, ce père de famille songe d’abord à cet homme, à la souffrance qui peut pousser à un tel geste.

Cet album se pose non seulement en devoir de mémoire, mais il invite les adolescents à réfléchir à ces actes, et encore plus, à l’Homme qui porte, bien au-delà de lui-même, ce geste excessif.

Mon avis

H. B., ce sont les initiales derrière Human Bomb, la bombe humaine qui se préparait à commettre l’irréparable, mais – comme le mentionne le narrateur du récit – H. B. peut aussi signifier Human being, un être humain, Érik Schmitt, sans doute éperdu de souffrance pour décider de venir mourir dans une classe de tout-petits.

C’est ce qui sous-tend avant tout le discours tenu dans l’album. Mettre fin aux préjugés, sans cautionner bien sûr, mais essayer de comprendre l’horreur, découvrir ce qui peut mener un homme à commettre l’horrible.

Thierry Lenain a l’habitude de mettre en scène des sujets qui bousculent nos à priori, des thèmes qui invitent à questionner le monde qui nous entoure, à bouleverser nos repères pour mieux comprendre l’humain dans toute sa complexité. Il écrit sur la mort, l’enfance, la maladie parce qu’« il ne faut pas laisser les enfants seuls avec leur souffrance », confiait-il lors d’une conférence tenue au Congrès de Mots et de craie en avril dernier à Sherbrooke. H.B. c’est tout ça, c’est l’horrible, la peur, le mal-être, mais aussi une fenêtre ouverte sur l’autre monde, le côté sombre, l’autre côté du miroir qui nous fait si peur. Puis, au texte senti, à la fois doux, franc et direct de Lenain, se joignent les illustrations coup de poing de Sophie Dutertre. Le trait grossier, les lignes robustes, froides, hachurées, témoignent du malaise et renforcent la tension omniprésente dans le récit. À mettre entre toutes les mains pour imaginer, ensemble, un monde meilleur.

H.B. était épuisé, il est disponible en ligne. Sautez sur l'occasion !