« Tout est calme, assourdi. Je somnole dans la pénombre, bercée par le tic-tac familier de l’horloge du salon. Cela fait plusieurs jours que les pies jacassent avec un enthousiasme particulier et que l’air embaume la sève de loin : l’été est là. Alors j’attends. Tout à coup, un son strident résonne dans mon hall et traverse mes pièces de haut en bas, vrillant ma rampe d’escalier pour aller rebondir jusque dans mes combles. Je mets quelques secondes à comprendre…C’est la sonnette de l’entrée ! Les enfants sont revenus ! »
Ainsi débute cette histoire étonnante, racontée d’un point de vue singulier, celui d’une vieille maison, aussi vieille que ce mimosa quatre saisons dont les branches s’appuient contre les vitres de ses fenêtres. Anaïs Brunet met de cette façon en lumière le lien particulier qu’entretiennent des enfants avec la maison d’été, celle de leurs jeux, de leurs vacances, du bon temps.
Si les petits sauront se laisser porter surtout par le côté ludique mis en scène, par l’importance accordée au jeu, à la liberté des enfants, du plaisir qu’ils ont à remplir les journées, les plus grands se souviendront de leur enfance, pas si lointaine, et des assises qui font ce qu’ils sont devenus.
C’est sans doute l’angle emprunté, la perspective animiste du discours qui rend cet album si touchant. L’idée de faire vivre une maison de bois, de plonger le lecteur dans un univers de bord de mer où même le vieux phare en pierre a une âme et veille sur les enfants, rend cette relation encore plus vivante. Les petits s’amusent, mangent, dorment en toute quiétude, protégés par ces murs solides et sécurisants. Aucune figure parentale humaine n’apparaît ici, la maison joue ce rôle avec un sérieux émouvant: « Quelle mère a la chance de voir ses enfants retourner dans son ventre des années après leur naissance ? Moi, je peux les envelopper, fermer mes portes et mes fenêtres pour mieux les entendre rêver. » L’écriture fluide, détaillée, le ton maternel, le vocabulaire riche de Brunet nous transportent dans ce décor estival bordé par la mer et le vent, là où l’insouciance et la liberté règnent en roi et maitre. Les peintures colorées et vibrantes témoignent de la vie débordante qui agite cet oasis de paix, mais le trait froid, les lignes droites ne rendent peut-être pas toute la douceur ressentie à la lecture. Néanmoins, la beauté et la nostalgie qui en émanent en font une œuvre à découvrir, à partager, mais plus que tout, elle donne drôlement envie de quitter le bitume pour rejoindre la mer.
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