Billet rédigé par Marie Fradette, spécialiste en littérature jeunesse
« Élyséa était le pays le plus heureux d’entre tous. Il y régnait joie et bienveillance. Dans le ciel, invariablement clair, scintillait un doux soleil. Sa lumière protectrice permettait aux fruits de s’épanouir. Les potagers et les champs offraient généreusement de quoi nourrir le peuple. » Mais ce paradis fut d’un coup – et sans avertissement – englouti par la terre. Le peuple dut se résigner à vivre sans lumière, sans verdure et se refaire un monde dans une « nuit profonde ».
Jour heureux pour ce peuple des ténèbres, la reine donna naissance à une enfant annonciatrice d’un temps nouveau. « Ses iris avaient la teinte exacte du ciel d’Élyséa au lever du jour. Un bleu si lumineux qu’il semblait presque blanc. » La jeune fille grandit et, le jour de ses noces, sa lueur s’amplifia au point où tout le royaume fut attiré vers le haut, où il retrouva son pays d’antan.
Dans ce conte écologique, Sophie Bénastre explore le thème porteur qu’est celui du respect de la terre. Les plus jeunes se laisseront charmer par la forme traditionnelle du conte – faite de prince, de princesse, de monde éloigné – alors que les plus grands y verront rapidement l’analogie avec l’importance de prendre soin et de profiter intelligemment de la terre qui nous nourrit.
C’est d’abord l’œil qui est sollicité devant la beauté de cet album grand format. La page couverture joue de contraste entre la lumière et l’obscurité, présentant la jeune princesse sur fond sombre. Ce jeu clair-obscur est ensuite présent tout au long de cet album dans lequel les illustrations pleine page de Sophie Lebot permettent de saisir cette opposition constante entre le paradis perdu et l’espoir de le retrouver grâce à Lucia. Au réalisme du trait se mêle un effet vaporeux créant une distance entre le monde réel et la vie sous terre, entre l’esprit du conte et les liens palpables que le lecteur peut tisser avec l’actualité.
Si les illustrations à bords perdus épousent l’atmosphère à la fois dramatique et espérante du conte, le texte relativement dense se laisse porter par elles créant un tout enveloppant. La plume à la fois simple et poétique de Bénastre invite les lecteurs à prendre la mesure de la beauté qui nous entoure sans effet moralisateur. Le merveilleux du conte joue pour beaucoup dans cette façon de présenter le sujet évitant de tomber dans des roulières ou une présentation facile et sans âme.
À lire, pour le plaisir des yeux, pour la poésie, pour l’effet apaisant que procure cet album, pour une façon toute enchanteresse d’aborder le thème.
Sophielit est partenaire des Librairies indépendantes du Québec (LIQ). Cliquez ici pour plus d'informations sur ce partenariat.
Nouveau commentaire