Billet rédigé par Marie Fradette, spécialiste de la littérature jeunesse
« Depuis ce matin, Zaza n’a plus de cœur. À l’instant même où son amoureux l’a quittée, son cœur s’est décroché. Impossible de mettre la main dessus. Il a disparu. Son cœur n’en est pourtant pas à son premier coup dur. Il y a eu la perte d’Albert, son grand-père. La disparition de son chien, Igor, un soir d’automne […] Mais cette fois-ci, c’est du sérieux. »
Parti, envolé, son cœur a laissé un immense vide, là, tout au milieu de sa poitrine. Loin de se recroqueviller dans un petit coin de sa maison, Zaza entreprend mille et une recherches pour le trouver, allant même au bureau des objets perdus où l’employé lui répond : « Votre cœur ? Aucune chance ! De nos jours, plus personne ne ramène les cœurs perdus. Si quelqu’un l’a trouvé, je vous l’assure, il l’a gardé. » La jeune fille fera ainsi des pieds et des mains pour le remettre en place, peu importe son état.
Si les plus petits peuvent se laisser charmer par cette Zaza pétillante, par la recherche du cœur à travers la ville, la poésie avec laquelle l’universel et intemporel thème du chagrin amoureux est abordé saura rejoindre les adolescents.
Paru en 2014, cet album immensément poétique de Caroline Barber est d’abord et avant tout un hymne à l’amour. L’amour de soi, de la capacité de se retrouver, de se remettre après un chagrin énorme. La quête entreprise par Zaza équivaut à cette période de deuil, à cette traversée nécessaire avant le retour au bienêtre.
Si le texte tout simple permet de suivre le parcours de l’héroïne, de sentir la peine tout comme l’espoir de retrouver son cœur, le graphisme et les illustrations de Marianne Pasquet expriment avec tout autant de douceur et de sensibilité l’émotion vécue par Zaza. Il y a d’abord un changement de perspectives fréquent, permettant de mettre l’emphase sur certaines scènes, notamment sur le cœur en fin de parcours, abimé, décoloré, mais il y aussi une variation importante de la graphie, laquelle met l’emphase sur certains mots. Par exemple, les lettres du mot « chancelle » sont disposées de façon déséquilibrée afin d’épouser l’état de Zaza, le mot « disparu », associé au cœur, s’efface, laissant à peine voir la lettre « u », et ainsi de suite. Le texte se fait image, participe de cette houle émotionnelle, s’ajustant à Zaza, à chacune des pages.
C’est un album d’une grande douceur à découvrir pour tout ce qu’il est, pour la richesse de cette complémentarité entre le texte et les illustrations, pour la beauté et pour la poésie avec laquelle le thème est mis en scène.
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