« J’étais tombé du nid. Un sale coucou m’avait poussé pour prendre ma place. Elle n’avait pas vu ma chute au pied de la tour en ruine où j’étais né. Mais elle m’avait entendu crier et s’était approchée. C’est elle, Cornélia, qui m’avait sauvé des griffes de ce chat trop maigre et affamé qui tenait absolument à me croquer. À coups de pied, Cornélia lui avait réglé son compte. Elle l’avait tué. »
Cornélia, orpheline et aveugle, coule ses journées à l’Orphelinat du Grand A avec Jack, son fidèle corbeau, et Virginia, sa tendre et meilleure amie. « Elles étaient comme deux sœurs et aimaient qu’on les confonde. On eût dit qu’elles n’avaient qu’un seul cœur. Elles se promettaient de ne jamais se quitter et de vivre sans garçon. »
Une belle promesse qui ne tiendra pas la route devant le charme de Genius, seul homme à franchir les portes de l’orphelinat. L’attirance grandissante que Cornélia éprouve alors pour lui la mènera sur le chemin de l’anneau d’or, bijou ensorcelé qui changera le cours de son destin.
Amitié, amour, mais aussi curiosité et désobéissance forment la trame de fond du dernier titre du singulier duo Bernard et Roca. Si l’album est destiné aux 6-9 ans, les plus grands seront définitivement plus aptes à apprécier l’univers proposé et assurément attirés par l’aura sombre, inquiétante et envoutante du conte.
L’amorce du récit, dépeignant une Cornélia à la fois douce et violente, donne le ton à l’atmosphère troublante qui suivra. Fred Bernard met ici en scène le propre du conte merveilleux, empreint de personnages bien définis, de pays inconnus, de prodiges, de sorts et de pardon. La narration tenue par « Jack le corbac », qui nous raconte les évènements à hauteur d’oiseaux, ajoute à l’effet enchanteur et surnaturel de l’ensemble.
Et à l’écriture enveloppante et imagée de Bernard, se joint les somptueux tableaux de François Roca. Si les différents plans et angles nous permettent de sentir l’intensité des émotions vécues par les personnages, la force de Roca reste sans doute l’habileté avec laquelle il manie la lumière et l’ombre, parvenant à attirer l’œil là où il faut.
Dix-neuvième album du duo à paraitre chez Albin Michel jeunesse – sans compter tous les titres qu’ils ont publié en solo ou chez d’autres éditeurs – La malédiction de l’anneau d’or s’inscrit dans cette lignée de beaux albums qui méritent un temps d’arrêt afin d’en savourer et d’en découvrir toute la richesse, impossible à saisir en une seule lecture rapide.
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