Lucy a été violée par trois garçons de l’école. Ils ont nié, elle a été trainée dans la boue et elle est partie. Depuis, Spencer, Eric et Ennis continuent d’être au sommet de la pyramide de la popularité, et partagent leurs moyens les plus efficaces pour attirer des filles dans leur lit, notamment de les faire boire au point qu’elles ne pourront plus dire non. Quand Grace, fille d’une pasteure, arrive dans la petite ville de Prescott, et qu’elle trouve les appels à l’aide que Lucy a gravés dans le bas des murs de sa chambre, elle décide que ça doit changer. Avec Erin, asperger qui a vécu un traumatisme, et Rosina, jeune femme d’origine latine, homosexuelle, qui doit refuser les avances au restaurant de son oncle où elle travaille, elle lance Les filles de nulle part et initie un mouvement de rébellion chez les filles : cessons d’être des proies. Finie l’impunité.
Nous, les filles de nulle part est un roman décidément féministe qui évoque la culture du viol, la notion de consentement et d’entraide féminine. Dense, complexe à cause de la multitude de personnages et des changements de narration, mais aussi très dynamique et écrit dans une langue accessible, ce roman s’adresse aux lecteurs intermédiaires et avancés.
J’ai été rapidement emballée par l’histoire, cette idée de retournement de situation, de filles qui décident de refuser publiquement le traitement de « proie », dénoncent les agissements des garçons… et le tout avec nuances. En effet, on voit aussi que les filles sont excellentes pour se « bitcher », que certaines ont aussi simplement envie d’être désirée et combattent leur malêtre par le contact avec les autres, que les filles noires ont parfois l’impression qu’elles n’ont pas le droit aux mêmes revendications que les blanches aux États-Unis, que tous les garçons n’agissent pas tous de la même façon, qu’il y a aussi un danger de généralisation. Bref, Nous, les filles de nulle part est un livre tout à fait dans la lignée de #moiaussi : il déculpabilise les victimes et montre entre autres comment la culture du viol, bien installée, est si perverse, tout en donnant des idées pour la contrer. C’est un livre à conseiller aux adolescentes qui vieillissent et pourraient subir ce genre de comportements.
Mais bon, ce n’est pas un coup de cœur total parce que, côté écriture, c’est particulier. Il y a les courriels des Filles de nulle part et les réponses des Vrais Mecs de Prescott, ainsi que des courts interludes dans la tête des différentes filles jamais nommées qui sont très accrocheurs, mais le reste des chapitres proposent une narration extérieure un peu froide et inégale. C’est dommage, parce que ce roman est tout à fait d’actualité et peut faire réfléchir bien des filles : ensemble, on peut faire beaucoup. (Bref, on lit quand même…!)
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