Quel prix est-on prêt à payer pour ne plus souffrir ? Quand les parents d’Ari sont morts dans un incendie, quand l’adolescente n’était qu’une fillette, sa tante Jess l’a amenée chez une hékamiste pour effacer leur souvenir afin qu’Ari ne souffre pas de leur absence. De ce sort, Ari ne garde qu’une gêne au poignet. L’équilibre nécessaire de l’hékamie : tout sort doit être équilibré. Aussi, quand son petit ami Win se tue, Ari n’hésite pas longtemps : elle ne veut pas de cette souffrance. Sauf qu’un deuxième sort du même type peut causer des effets ravageurs et qu’elle va devoir cacher ce qu’elle a fait à Diana et à Markos, des amis proches d’elles… et de Win.
Kay aussi a eu recours deux fois à l’hékamiste. Une première pour refaire ses traits, une deuxième pour garder près d’elles les gens qu’elle aime. Peu importe le cout. Sauf que les sorts ont parfois des conséquences inattendues. Et que leur petit groupe pourrait bien en faire les frais.
Apportant une touche de magie dans son récit grâce à l’hékamie, une science occulte interdite dont la pratique est passible d’emprisonnement, Maggie Lehrman s’intéresse à la notion de souvenir, de beauté, d’amitié véritable et de destin. Complexifié par les multiples intrigues développées autour des différents personnages, ce roman convient aux lecteurs intermédiaires et avancés.
Je réagis souvent négativement aux accroches publicitaires sur les romans. Ici, on me promettait un mélange entre Nous, les menteurs et Eternal sunshine of the spotless mind. J’étais sceptique. Très sceptique. Puis j’ai commencé et… j’ai été agréablement surprise.
Il y a vraiment quelque chose de très particulier dans ce roman. L’hékamie apporte une dose d’originalité sympathique, mais c’est aussi la consistance des destins de chacun des personnages qui est intéressante : Ari et sa perte, celle de Win d’abord, celle de sa passion ensuite, Diana qui se cherche, Kay qui ne sait plus comment exister aux yeux des autres sans un sort, Markos et sa famille étrange, de laquelle il se sent souvent exclu, Win aussi, puisque le récit n’est pas linéaire, aux prises avec des pensées noires plus qu’envahissantes, et Echo, la fille de l’hékamiste de la ville, celle qui jettera ce grain de sable qui fera tout dérailler. Ils sont nombreux, mais leurs histoires personnelles sont inextricablement liées et de plus en plus entretissées au fil des chapitres.
Par ailleurs, Maggie Lehrman a aussi géré d’une main de maitre tout ce qui a trait à la magie avec cette notion d’équilibre : un peu comme dans les jeux de rôles, chaque personne a « des points » répartis : beauté, intelligence, force… et jouer avec l’un ou l’autre de ces champs entraine nécessairement des conséquences. De même, cette notion d’équilibre est à la base de quelques scènes particulièrement fortes. Cette magie permet au récit de se doter d’une touche d’extraordinaire qui ne fait finalement que mettre en valeur des sentiments qui touchent à l’universel : le deuil, l’amour, la solitude, la jalousie.
En bref? Un roman qui joue un peu avec ses lecteurs et offre une réflexion sur notre rapport à la mémoire, l’impact que nos choix peuvent avoir sur nous, et sur les autres. Un peu de Nous, les menteurs et d’Eternal Sunshine of the spotless mind, finalement!
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