Billet rédigé par Jean-François Tremblay, enseignant
En 1831, le jeune Anglais Charles Darwin embarque à bord du voilier Beagle pour un voyage qui révolutionnera le monde de la science. Lui qui, pourtant, ne devait participer à ce tour du monde qu'en tant qu'intellectuel pour distraire le capitaine, prend son rôle de naturaliste au sérieux. Pendant cinq ans, il observe la planète : animaux, fossiles, sol, plantes, peuples non civilisés… Ses travaux feront sensation dans le monde, et ce, avant même son retour en Europe. Et puis, un jour, aux iles Galápagos, lui et son assistant feront une découverte qui mettra le jeune homme sur la piste de la théorie magistrale qu'il publiera plusieurs années plus tard : celle de l'évolution des espèces.
HSM Beagle, aux origines de Darwin est une longue bande dessinée qui raconte certains épisodes importants du voyage autour du monde de Darwin. Ce récit se veut une interprétation libre et romancée de ce qu'aurait pu être cette aventure; l'auteur avertit bien ses lecteurs qu'il laisse la précision historique aux historiens. Abordant plusieurs thèmes scientifiques, les tensions entre la religion et la science et le respects des droits humains, cette bande dessinée s'adresse aux lecteurs intermédiaires de 12 ans et plus.
HSM Beagle, aux origines de Darwin offre assurément un premier contact intéressant à ceux qui veulent approfondir leurs connaissances à propos du probablement plus célèbre naturaliste que la Terre ait porté et de sa théorie. En effet, il est intéressant, pour le lecteur, de constater l'évolution du jeune adulte insouciant en un homme plus réfléchi qui cultive le doute pour mieux apprendre.
Non, la Terre ne peut avoir que 6 000 ans…
Au cours de son voyage, certaines idées de Darwin et d'autres qui émergent de ses observations seront constamment confrontées aux idées traditionnelles de la bourgeoisie anglaise de l'époque. L'auteur, Fabien Grolleau, réussit à bien relever ces dilemmes moraux que pouvaient vivre certains chercheurs, notamment en ce qui concerne les textes bibliques. Par ailleurs, une authentique dispute entre Darwin et le capitaine, Robert FitzRoy, constitue un moment marquant du récit. Le premier prend la défense d'un jeune esclave en prétendant que tout homme est égal aux autres, et que l'esclavage est une vraie honte pour l'humanité. Le lecteur comprend alors comment cette idée, si rare à l'époque, pouvait déranger.
En fin de livre, deux pages bien remplies de notes de l'auteur viennent préciser et enrichir nos réflexions, entre autres sur la singularité du voyage, l'esclavage, les peuples primitifs et l'élaboration de la théorie de l'évolution. Écrites avec un souci d'exactitude bien senti, elles expliquent, par exemple, le sort probable des trois indigènes capturés, civilisés en Europe puis relâchés, lors de ce voyage, dans leur village natal du sud de l'Argentine. Ces différentes explications permettent de mieux saisir le contexte social de l'époque ainsi que la portée des idées de Darwin (parfois avant-gardistes – comme sur l'esclavage –, parfois réactionnaires – comme pour ses égards envers les peuples autochtones).
Au final, les choix faits par l'auteur permettent d'appréhender la genèse de la théorie de l'évolution tout en sachant captiver avec les aventures vécues par l'équipage. Les dernières pages, se déroulant aux iles Galápagos, complètent de façon juste le livre en exposant clairement la théorie. À ce moment, le lecteur réalise à quel point toutes les sciences sont dépendantes les unes des autres et à quel point s'ouvrir à la connaissance universelle a été bénéfique pour Darwin. De plus, les dessins mettent de l'avant plusieurs représentations d'espèces, ce qui conforte la vocation scientifique de l'oeuvre. D'ailleurs, le fait que plusieurs vignettes laissent toute la place à l'illustrateur allège la lecture, qui peut parfois être un peu plus ardu. Une très belle lecture, donc!
Merci à Dargaud pour la BD!
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