À dix-neuf ans, Sadie s’est volatilisée. Il y a eu la roulotte vide, puis la voiture abandonnée, retrouvée bien plus loin, avec son sac à l’intérieur. Entre temps, une histoire que personne ne connait, mais qui intéresse le journaliste West McCray. Au point où il fait un podcast, remontant les indices pour suivre la trace de Sadie et comprendre ce qui l’a poussée à partir, la route qu’elle a empruntée et les rencontres, plus ou moins heureuses, qu’elle a faites en chemin. C’est ainsi qu’il découvre que la jeune sœur de Sadie, Mattie, dont elle prenait soin depuis leur mère toxicomane était partie, est morte assassinée quelques jours avant. Si la police n’avait aucune piste, Sadie, elle, était persuadée de connaitre l’identité du tueur. Et était bien décidée à le retrouver…
Publié en « adulte » aux éditions de L’homme et en jeunesse chez De la Martinière J, Sadie est en fait justement un roman policier « crossover », qui plaira tant aux adolescents qu’aux adultes, avec une intrigue corsée qui utilise les codes du podcast pour remonter la trace de Sadie. Abordant des thèmes durs, il s’adresse toutefois à un public avisé.
C’est la forme qui fait d’abord l’attrait de ce livre : avec la mode des podcasts (notamment ceux qui traitent justement d’enquêtes), c’est étonnant que si peu de livres empruntent cette forme d’écriture qui est pourtant particulièrement efficace. Si on est dans la fiction, cette voix de journaliste nous donne l’impression que le récit est réel et donne d’autant plus de relief à l’histoire.
Le roman est séparé en deux parties qui s’entrecroisent, deux temporalités différentes : celle de Sadie, qui part à la recherche de son ex-beau-père, certaine qu’il a tué sa sœur, puis celle de West McCray, quelques mois plus tard, qui raconte sous forme de retranscription de podcast (avec des entrevues et des comptes-rendus) ses recherches sur la jeune femme. En espérant la retrouver avant qu’il soit trop tard. Cette alternance crée une tension certaine, rendant la lecture captivante, haletante.
Les parties de Sadie sont aussi très fortes. La jeune femme est déterminée, presque froide dans sa quête, affrontant la solitude et ses propres démons et on s’y attache très rapidement. Au fil de l’histoire, on comprend que son histoire est intrinsèquement liée à sa quête et que c’est aussi sa propre vengeance qu’elle prépare. Les thèmes sont durs (il est entre autres question de pédophilie) et l’ambiance sombre, mais on ne tombe jamais dans le voyeurisme, dans le trop. Courtney Summers joue à l’équilibriste sur une fine ligne et propose à travers cette histoire un portrait de l’Amérique profonde et de ses enfants, résilients, avec une héroïne courageuse.
C’est un roman différent que j’ai vraiment aimé découvrir et que j’ai trainé absolument partout avec moi le temps d’en finir la lecture, profitant de chaque instant pour avancer, incapable de laisser Sadie toute seule. Jusqu’à la fin… dont je ne dirai rien !
Sophielit est partenaire des Librairies indépendantes du Québec (LIQ). Cliquez ici pour plus d'informations sur ce partenariat.
Nouveau commentaire