Cogito

À dix-huit ans, Roxane a de moins en moins d’options pour décrocher le Brevet d’Accès aux Corporations qui lui permettrait peut-être d’obtenir un meilleur emploi que celui de ses parents. Il faut dire que depuis que les robots ont gagné en intelligence, les humains sont majoritairement relégués à des tâches ingrates. Alors quand elle se fait offrir un stage de programmation neuronale, une nouvelle technologie promettant de transformer n’importe qui en génie, elle accepte malgré ses réticences à faire confiance à cette industrie qui met tant de gens en difficulté.

C’est ainsi qu’elle prend la direction des iles Fortunées, un archipel futuriste entièrement dédié à cette programmation où se retrouvent les rejetons des familles les plus riches, décidés à acheter leur éducation. Aussitôt, elle comprend que son statut de boursière ne sera pas facile. Mais ce ne sera pas sa seule difficulté. Cette méthode expérimentale qui utilise l’intelligence artificielle pour « améliorer » la substance même de l’esprit humain est-elle vraiment sure? Et si son créateur n’avait pas pensé à tout?

Avec ce roman de science-fiction qui pose de nombreuses questions éthiques, notamment sur les relations entre les hommes et les robots ainsi que sur la place que ces derniers prendront dans le futur, Victor Dixen offre un thriller haletant à multiples niveaux. Complexe, Cogito s’adresse aux lecteurs avancés.

Mon avis

« Depuis le début de ce stage, tout le monde se fout de moi, quand je préviens que toute loi risque d'être contournée. Tout le monde me traite d'allumé, quand je dis que les IA finiront par se rebeller. Et tout le monde considère que mes films de SF sont des histoires à dormir debout. Mais c'est à ça que servent les histoires, justement : à se préparer au pire, à extraire du sens, à entrevoir les possibles! »

Victor Dixen est peut-être l’auteur français le plus américain dans son efficacité pour construire des histoires addictives, dans le rythme qu’il insuffle à ses récits, mais il ajoute aussi toujours une profondeur à ses intrigues en posant, au fil des aventures, des questions qui font nécessairement réfléchir le lecteur. Ici, si le thème n’est pas des plus original, l’auteur aborde l’intelligence artificielle en faisant des références philosophiques à Descartes et Rousseau qui viennent nourrir la réflexion. Comme avec Phobos, l’auteur a donc imaginé les dérives d’un futur potentiel et, si la première partie est plus lente, plantant le décor, laissant les personnages faire connaissance, on sent tout de suite que les dés sont pipés et la deuxième partie est explosive (et c’est le cas de le dire).

Au départ, je n’ai pas vraiment accroché à Roxanne (le personnage est parfois difficile à suivre et ses références constantes à son passé de « chienne » sont lourdes), mais plusieurs de ses acolytes ont titillé ma curiosité. Il faut dire que c’est une autre spécialité de Dixen : mettre en scène un panel de personnages (et leur donner chaque fois un trait de caractère distinctif qui nous permettra de les reconnaitre malgré la multiplicité) qui possèdent des atouts qui seront utilisés tout au long de l’intrigue, pour faire avancer le récit ou encore lui offrir un souffle nouveau. Bref, on ne s’ennuie pas avec ce Cogito qui donne parfois même vraiment froid dans le dos. Espérons que les fictions terrifiantes qui s’écrivent sur le sujet arrivent à convaincre les humains des nécessaires garde-fous à mettre en place…  

Merci à Robert Laffont pour le service de presse!