La mère d’Irina a toujours dit à sa fille que sa propre mère était une vieille riche méchante et désintéressée, mais l’adolescente a noué des liens avec son aïeule quelques mois avant sa mort. Elle n’est donc pas si surprise quand elle est convoquée chez le notaire pour récupérer un héritage. Mais alors qu’elle espérait de l’argent, ce qui l’aiderait bien alors qu’elle vit dans un appartement minable en banlieue de Paris et vient d’être recalée à un examen pour faire Science Po, elle n’a droit qu’à une lettre lui enjoignant de ne pas ouvrir le coffre duquel elle reçoit une clé. C’est pourtant bien mal connaitre Irina, qui, ne cherchant même pas à résister à la tentation, découvre avec stupeur un objet mystérieux, sorte de peau durcie, sur laquelle une inscription en arabe est notée. Aussitôt celle-ci traduite par sa meilleure amie Halima et lue, les moindres souhaits d’Irina s’exaucent, comme par magie. La plus grande fête ? L’amour de Toki ? Une fortune dont elle n’aurait jamais osé rêver ? Tout lui arrive. Mais chaque vœu réalisé vient aussi avec une diminution de la peau et d’intenses souffrances pour Irina. Qu’est-ce que cette relique ? Et comment sauver sa propre vie ?
Reprenant la trame principale de La peau de chagrin de Balzac, mais dans une intrigue actuelle et remplie d’adrénaline qui fait des clins d’œil au classique, Gaël Aymon signe une histoire qui parle de classes sociales et de famille, mais aussi qui nous interpelle sur le sens de la vie, sur l’origine du bonheur. Pour les lecteurs intermédiaires et avancés.
Mes souvenirs de La peau de chagrin étaient assez flous au moment de ma lecture de ce livre-ci, si bien que je suis pas en mesure de vous faire une comparaison, mais je dois dire que j’ai beaucoup aimé cette version-ci de l’histoire, avec sa mise à jour et l’adrénaline qui monte, mais aussi la réflexion toujours présente.
Le roman est constitué de trois parties au travers desquelles le ton change. Au début, on est plus dans le social. Gaël Aymon dépeint la dure vie d’Irina avec une mère pour le moins irresponsable et le lien avec sa meilleure Halima qui la garde saine d’esprit. Il parle aussi de l’égalité des chances dans les banlieues (avec l’histoire autour du concours de Science po) et de racisme, avant de faire basculer Irina dans le surnaturel avec la réalisation de ses premiers voeux. La deuxième est plus froide, alors qu’Irina s’est enfermée dans une grande maison de St-Bath et a pris ses distances avec Halima, devenue son assistante et son bras droit, mais sans plus partager avec elle ce qu’elle est vraiment. Ce qu’elle cherche, ce qu’elle attend. Mais tout cela ne sert qu’à préparer la troisième partie, dans laquelle la vérité éclate et où Halima gagne une place plus importante alors que toute l’action se joue autour d’elle, Irina se lançant de son côté dans une quête plus profonde des racines du bonheur. Cette séparation en partie permet à l’auteur de couvrir une plus large période, mais fait aussi en sorte que certains éléments sont éclipsés et que le lecteur doit souvent « accepter » la nouvelle situation sans y être préparé. Par ailleurs, la fin est un peu brusquée alors que des lettres retrouvées viennent changer l’éclairage du récit, mais de façon trop rapide pour que ça soit complètement crédible. Bref, je suis restée sur la faim pour la finale, mais j’ai tout de même aimé ma lecture qui, en plus, m’a donné envie de redécouvrir La peau de chagrin d’origine grâce à des références et des clins d’œil juste bien amenés. Il faut dire que Gaël Aymon rend particulièrement bien la relation malsaine qui se noue entre Irina et la Peau, comment celle-ci parvient à en prendre le contrôle, comment elle l’attend dans la mort. Ça fait réfléchir à nos propres désirs et à notre capacité (ou incapacité) à leur résister !
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