La bête

Billet rédigé par Gaëlle Guilleaume, libraire spécialisée en mangas

Belgique, 1955 : un Marsupilami destiné au zoo d'Anvers s'enfuit du bateau qui l'emmène vers sa future prison. Alors qu’il est perdu et affamé, ses pas le guident finalement à Bruxelles, où il rencontre François, un petit garçon, qui adore recueillir les animaux abandonnés au grand dam de sa mère. Une relation de confiance mutuelle s’installe doucement entre le petit garçon, tête de turc de sa classe, et cet animal étrange et inconnu. Pourtant, la bête intrigue et tout le monde ne lui veut pas forcément que du bien.

La bête est une réécriture audacieuse, plus sombre et plus réaliste, du Marsupilami de Frankin réalisée par Zidrou et Frank Pé. La série compte un tome à ce jour et est adaptée à tous types de lecteurs dès l’âge de 10 ans.

L’avis de Gaëlle

Zidrou et Frank Pé se réapproprient complètement le mythe du Marsupilami pour nous offrir un premier tome au graphisme et à l'ambiance à mille lieues de ce que Franquin a créé. Au gré des magnifiques décors et pleines pages de Frank Pé, le lecteur débarque en plein milieu des années 50 dans la capitale belge. Le dessin de l’illustrateur a d'ailleurs ce petit côté « vintage » qui évoque parfaitement ce « temps au Bruxelles bruxellait ». Les couleurs sont sombres, les traits plus réalistes et plus durs afin de nous entrainer dans une ambiance malsaine et pesante assez surprenante pour une histoire mettant en scène un Marsupilami.

Zidrou et Frank Pé ont, en effet, pris le parti d'imaginer ce qu'il serait véritablement arrivé au marsupilami s'il avait dû être découvert en plein milieu des années 50. À cette époque, on découvre à peine les espèces tropicales, on se fascine de manière malsaine pour ces animaux étranges et pour les bêtes de foire. À leurs côtés, on revient véritablement à ces années où les animaux étaient davantage considérés comme des objets de divertissement, des bêtes de foire, que comme des êtres vivants. Ainsi, le marsupilami fascine et terrifie à la fois les gens qui croisent son chemin, mais également les scientifiques qui désirent l'étudier. Au milieu de tous se trouve le petit François, ce gamin martyrisé à l'école, qui a tant d'amour à donner aux animaux. Entre lui et le marsupilami, une relation de confiance semble s'installer tout doucement. C'est beau, c'est tendre, c'est parfois drôle et surtout ça fait du bien dans une bande dessinée aussi sombre.

Réinventer ainsi le mythe du Marsupilami en se détachant complètement de l'image que le public en a depuis sa création en 1952 était un pari risqué. Zidrou et Frank Pé le relèvent pourtant avec succès et nous offrent un premier tome très prometteur qui laisse présager une série originale et unique dans l'univers de Spirou, mais surtout forte en émotions. On attend la suite avec une impatience non dissimulée !