À St-François-de-l’Avenir, les ados s’ennuient. Et c’est connu, quand on s’ennuie… on cherche les bêtises. Alors lorsque La Guêpe fait son apparition, ils sont nombreux à se laisser prendre au jeu. Au début c’est facile : un petit défi à relever, une information sur la personne de notre choix. C’est même pratique parce qu’on peut faire un peu ce qu’on veut et mettre ça sur le dos de Waspapp. Mais ça dérape vite et quand Antoine Rivard s’enlève la vie, les choses deviennent sérieuses.
Billie découvre le jeu en cherchant à en savoir plus sur les circonstances de la mort de celui avec lequel elle partageait justement un secret. Bien qu’elle reste généralement en retrait de la vie adolescente de la petite ville, Billie entre en contact avec la Guêpe… et devient rapidement sa nouvelle cible. Pour s’en sortir, elle devra jouer en équipe… et pas avec les ados les plus recommandables du coin.
Marie-Ève Bourassa a créé une intrigue qui mélange les petits secrets partagés à la Gossip Girl et les défis populaires de Snapchat avec cette Guêpe qui semble de plus en plus puissante au fil du récit et fait monter la tension. Avec un début plus lent et une langue riche, le roman s’adresse aux lecteurs intermédiaires et avancés.
Autrice de romans noirs pour adultes, Marie-Ève Bourassa fait son entrée en littérature jeunesse, pour ados avec ce roman, premier tome d’une série qui parle de l’ambiance des petites villes, de famille, de l’étape de la détermination personnelle aussi, de ce qu’on est, de ce qu’on devient. Son idée de La Guêpe, Waspapp est très accrocheuse et c’est un roman comme on en voit peu en littérature jeunesse québécoise, avec une intrigue réaliste qui tourne au thriller au fil des pages et devient de plus en plus intense tout en restant crédible.
Bref, l’histoire est vraiment excellente. Et pourtant, je n’ai pas été tout à fait convaincue parce qu’il aurait peut-être fallu retravailler un peu la forme pour que ce soit pleinement percutant.
En fait, tant l’autrice que sa directrice littéraire viennent du monde de la littérature adulte. Et ça se sent. Dans le début plus lent, qui commence par une scène forte et étrange, mais sans contexte réel, ce qui demande de la persévérance. Ce n’est pas mauvais en soi, mais c’est plus inhabituel dans une littérature réputée pour accrocher rapidement ses lecteurs.
Ce qui m’a dérangée, toutefois, c’est la langue employée. J’aime beaucoup le côté très littéraire des descriptions qui parsèment le récit, d’autant plus que c’est rafraichissant puisqu’au Québec on a parfois tendance à privilégier la compréhension à la beauté et au style en littérature jeunesse. Le souci est toutefois que le livre est narré par Billie et que, si les dialogues fonctionnent bien et sont tous du même niveau, dans une langue plus « ado », la narration, elle, fait de grands écarts. Oui, Billie est une ado-adulte, ce qui est expliqué notamment par l’histoire familiale (avec une mère en prison et un père qui trempe dans des histoires louches, si bien qu’elle doit parfois être l’adulte de la maison), et sa vision sur la vie est forcément plus mature, plus cynique aussi par instant (j’ai adoré), mais il y a des envolées littéraires qui ne s’accordent pas du tout avec elle, des descriptions où on sent vraiment le regard extérieur de l’adulte qui a de l’expérience, un large vocabulaire, une compréhension du monde différente.
Si le narrateur avait été omniscient, j’aurais été complètement emballée, c’est un chouette roman. Les personnages sont bien incarnés, l’intrigue gagne en intérêt et en épaisseur au fil des pages et on croit totalement à la possibilité d’une telle application, à son pouvoir d’attraction dans ce genre de petite ville ennuyante et à ses dérives. J’ai bien hâte d’avoir des retours d’ados !
Pssst ! La suite est sortie : Les fourmis.
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