Atlanta, 1890. Renvoyée de son travail de modiste parce qu’elle partageait trop ouvertement ses opinions avec les clientes, Jo désespère. Il faut dire que les Chinois sont particulièrement mal vus dans la ville et elle doit se compter chanceuse d’avoir un endroit où dormir. C’est pourquoi elle accepte de retourner comme domestique dans une riche demeure où elle a déjà été employée dans le passé, et ce, même si la fin avait été brusque et humiliante. Après tout, elle pourra travailler auprès de son père adoptif, celui avec lequel elle partage une cave située sous un journal. Un soir, elle entend d’ailleurs que les propriétaires du quotidien cherchent une façon d’attirer un lectorat plus large, elle a une idée. Et si donner son opinion pouvait être finalement source de prospérité au lieu d’ennuis ?
Stacey Lee mélange habilement Histoire, amour et affirmation de soi dans un récit qui montre un racisme moins présenté dans les livres, mais tout aussi percutant. Porté par une héroïne forte et résiliente, il s’adresse à un lectorat intermédiaire et avancé vu son grand nombre de pages !
J’ai beaucoup aimé ce roman qui m’a semblé rafraichissant de par son thème. J’avais entendu parler du racisme qui a sévi en Amérique envers les Chinois, mais c’est un des premiers livres que je lis sur le sujet et j’ai aimé la façon dont Stacey Lee présente les faits. Clairement, sans fioritures, mais avec des nuances qui permettent de découvrir tout un pan historique méconnu, alors que les États-Unis viennent d’instaurer le droit de vote pour les hommes, mais n’ont rien prévu pour les Asiatiques, qui ne trouvent souvent ni emplois ni logements décents et sont réduits à vivre dans des taudis et à se faire exploiter dans les champs. Il est intéressant aussi que Stacey Lee ait placé plusieurs personnages noirs dans l’entourage de Jo, ce qui permet à ses lecteurs de faire leurs propres parallèles. Elle amène par ailleurs son héroïne à croiser le chemins des suffragettes (les « white suffragettes » plus exactement), qui, à cette époque, ont fait avancer la cause des femmes, mais n’étaient pas du tout inclusives.
Bref, le récit est riche en informations, mais il reste très divertissant. En effet, il y a de nombreux fils conducteurs, de multiples rebondissements aussi, ce qui fait qu’on est rapidement accrochés. Il y a l’intrigue autour de la perte de l’emploi (et toutes les difficultés que vivent les asiatiques à ce moment, alors que), mais aussi celle qui entoure l’identité secrète de la mère de Jo ainsi que celle en lien avec la nouvelle chronique de la jeune femme de 17 ans.
Cette dernière est une des forces du récit. J’ai aimé la langue déliée de l’héroïne et sa façon bien à elle de prendre part au débat, de dire les choses telles qu’elles sont pour faire réfléchir. Si j’ai parfois eu l’impression que Jo est un peu en avance sur son temps et que les réactions à son égard sont un peu trop douces face à certaines de ses prises de position (il faut dire qu’à notre ère des médias sociaux on a parfois l’impression qu’une montagne nous tombe sur la tête dès qu’on fait un pas de côté), ça ne m’a pas empêché de prendre beaucoup de plaisir à lire ses chroniques anonymes !
À découvrir !
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Merci Sophie pour cet avis enthousiaste ! Je suis très fière de cette traduction et ravie de la voir chroniquée sur ce site :)