Comme le veut la tradition, l’empereur d’Aritsar gouverne avec, à ses côtés, seuls capables de le toucher physiquement, les onze conseillers et conseillères venus des onze royaumes d’Aristsar, uni.es entre elles et eux par le pouvoir du Rayon. Si quelqu’un souhaite la mort de l’empereur, il faut donc que cette personne fasse partie de ses plus intimes, chose improbable, puisque les membres du rayon ne peuvent être consacrés s’ils n’ont pas le cœur pur.
Impossible. Sauf si on a l’esprit machiavélique de la Dame, qui a créé sa fille dans cette optique, la protégeant de tout et instillant au creux de son êtresprit, sans qu’elle s’en rende compte, un vœu terrible. Et si Tarisaï lutte contre cette force qui lui brule les tripes, elle n’aura bientôt pas le choix d’agir…
D’origine nigériane, Jordan Ifueko signe un récit de fantasy, premier tome d’une duologie, qui tire ses inspirations dans les traditions africaines et propose de multiples rebondissements. Pour grand.es lecteur.rices !
C’est la couverture qui m’a tout de suite intriguée et le résumé est particulièrement efficace : « Elle était née pour le tuer… mais elle a promis de le protéger. » Et là on se dit que ça tombera forcément dans la romance un peu facile, mais… du tout !
En fait, ce livre est vraiment dans une classe à part. À la fois pour le contexte et la culture africaine qui y est mise de l’avant, ce qui est rare dans les romans de fantasy pour ados, puis par la complexité de son intrigue, qui offre une quantité de nuances, tant dans l’évolution du récit que des personnages. Ces derniers sont coincés entre la tradition, leurs désirs personnels et les manigances des uns et des autres, et tous possèdent de multiples facettes. En effet, prenez garde au moment de les catégoriser en « bons » ou « méchants », vous pourriez être surpris.es !
Tarisaï est pour sa part une héroïne particulièrement bien construite puisqu’elle est à la fois forte et faible, créatrice de son propre chemin et soumise à la volonté d’une génitrice qui lui a retiré (en partie) son libre arbitre. Ses sentiments paradoxaux envers le prince ainsi qu’un autre conseiller viennent aussi mettre en valeur sa sensibilité sans que l’amour prenne trop d’espace et contamine tout le reste.
En effet, le plus important au fil de cette histoire demeure la politique, la façon dont les douze mènent le monde, la place des femmes dans cette hiérarchie, la légitimité des « élus », la suppression de l’Histoire individuelle des peuples, la manière dont le pouvoir corrompt. Bref, les enjeux sont multiples et on sent au fil des pages que Jordan Ifueko a pensé son récit en profondeur : oui, il y a de nombreuses surprises, mais tout s’explique.
Disons-le, j’ai parfois eu l’impression que l’histoire était ralentie par les détails et les précisions, on parle quand même d’un livre de 464 pages avec une écriture vraiment petite ! Néanmoins, je reconnais que prendre son temps est gagnant puisque les détails servent justement à s’assurer que chaque geste, chaque décision des différents personnages, est explicable, en plus de contribuer à créer un monde bien réel qui transporte ses lecteur.rices complètement ailleurs.
Décidément, c’est une autrice à suivre !
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