Juillet 1969. Michel aurait bien voulu être rivé à son écran pour regarder des hommes fouler pour la première fois le sol de la Lune, mais une rencontre inattendue le lance plutôt sur la piste d’un chasseur disparu dans les bois entourant le Lac Princesse, loin dans la Côte-Nord. Et cette aventure pourrait bien changer le reste de sa vie.
Cœur-Ténébreux est un récit « paysage », dans lequel les descriptions sont nombreuses, mais laisse aussi une juste part à des scènes marquantes. Attention, ce roman vise un lectorat intermédiaire malgré sa brièveté.
Camille Bouchard est habitué de se promener hors des sentiers battus, mais cette fois j’ai l’impression de découvrir une nouvelle facette de son talent. Lui-même dit d’ailleurs qu’il a changé de style d’écriture en s’inspirant de Joseph Conrad pour raconter l’histoire de Michel dans un style assez lent, plus introspectif.
Déjà, la forme est particulière, alors que c’est un Michel adulte, grand-père, qui revient sur cet épisode de sa jeunesse pendant un souper familial bien arrosé. Cette double temporalité revient ponctuellement alors qu’entre deux descriptions de paysage il s’adresse à ses enfants et cela prend tout son sens à la fin.
Le style est aussi différent, plus lent, littéraire et introspectif, tout en laissant place à de l’action (notamment dans la deuxième partie). Le récit est aussi l’occasion pour l’auteur de parler de préoccupations environnementales et de cohabitation entre Autochtones et Blancs, ce qui fait que, même si le récit est historique (ce qui est ancré notamment par les références aux premiers astronautes à aller sur la Lune), il est résolument moderne.
Si j’ai bien aimé l’ensemble, ce que j’ai préféré dans cette lecture est tout l’aspect « esprit humain » exploré au fil du récit. Dans la façon dont Michel aborde ce voyage solitaire et les rencontres, mais aussi dans ce qu’il découvre au Lac Princesse, alors qu’il est question de l’emprise que certains ont sur d’autres (les réflexions qu’apporte l’auteur tout au long des descriptions de ce qui s’y passe sont très intéressantes !).
Bref, c’est un récit différent, visant un public plus « deuxième cycle du secondaire » que premier, mais aussi un texte important, sensible.
À noter : il faut savoir que l’auteur utilise un terme aujourd’hui considéré comme péjoratif pour parler de certains personnages autochtones, mais avec parcimonie et toujours dans l’optique de rendre l’esprit de l’époque.
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