Franz, Dora, la petite fille et sa poupée

Billet rédigé par Marie Fradette, spécialiste de la littérature jeunesse

Alors que Franz et Dora se promènent dans le parc, ils rencontrent la petite Ingrid en pleurs parce que sa poupée a disparu. Franz lui explique que cette dernière est plutôt partie en voyage et qu’une lettre envoyée chez lui, à son nom,  le prouve. Évidemment, Ingrid veut voir cette missive. Alors, le soir venu, Franz écrit la lettre afin de ne pas décevoir la fillette impatiente. La poupée raconte d’abord son voyage, puis plusieurs lettres suivent jusqu’à une dernière dans laquelle elle annonce son mariage et sa décision de ne pas revenir auprès d’elle. Le temps est alors venu pour Ingrid de vivre sa vie, elle aussi. Parallèlement à cette histoire, on entre surtout dans la vie de Franz et  Dora. Le premier, écrivain insatisfait de sa plume, ralenti par son souffle court –il mourra d’ailleurs de la tuberculose- parvient tout de même à couler ses derniers jours de façon heureuse auprès de Dora, sa jeune bien aimée.

Mon avis

Franz, c’est Franz Kafka, auteur phare du XXe siècle qui nous a donné des œuvres prenantes, dures,  notamment Le procès et La métamorphose, pour ne nommer que les plus connues. Dans cet album, il n’est pas question de la vie entière de l’auteur, mais plutôt d’un regard posé sur la fin de ses jours, sur son travail d’écrivain à l’approche de la mort. Éternel insatisfait de son écriture, il aurait d’ailleurs demandé à son ami Max de tout bruler ses manuscrits à sa mort. Alors, on le voit ici se donner une raison d’écrire, qui est celle de ne pas décevoir cette petite attendant impatiemment les missives de sa poupée. Le bref portrait qui en est fait invite à découvrir Kafka, à connaitre son œuvre, les raisons qui l’ont amené à douter de son talent. Il faut dire qu’on nous offre peu de son histoire – on ne connaitra pas l’homme après la lecture –, mais le portrait très tendre, positif de l’écrivain entouré de son amoureuse nous le rend attachant et stimule notre intérêt. Enfin, les aquarelles de Tiziana Romanin accompagnent avec tendresse les mots de Didier Lévy. Les lignes obliques, les perspectives diverses ainsi que les couleurs chaudes dynamisent le tout, apportent beaucoup de mouvement à l’ensemble. Un très bel album.