« Le brin de paille foulé à tes pieds ne te semble rien mais logé dans l’œil par un léger vent il épargne le chevreuil du tir du chasseur aveuglé ».
Ce Brin de paille, petit poème, tout près du haïku, écrit par Jean Sioui, poète wendat, côtoie La cathédrale de Bourges du Marocain Abdellatif Laâbi, la Musique des sphères du Bulgare Nicolaï Kantchev, Le silence du soir de Victor Hugo ou encore ces Blues poignants du Tunisien Tahar Berki :
« J’ai pris tes cheveux un à un j’ai tissé une barque /Dans la brise de tes yeux j’ai navigué vers les iles aux tulipes bleues /Il neigeait sur les coquelicots de tes lèvres /Il pleuvait des étoiles sur le toit de mon cœur ».
Cette anthologie de poèmes francophones a été pensée en 2016 pour souligner l’année de la francophonie. Nous parcourons ainsi le monde où ont été cueillis des bouquets de mots, des images qui donnent à voir et sentir les différents pays. Ce recueil permet non seulement d’initier les lecteurs plus âgés aux grands poètes d’ici que sont Vigneault, Leclerc, Garneau, mais aussi à découvrir des plumes d’ailleurs qui nourrissent l’âme.
Quelle bonne idée que celle-là ! Réunir des poésies issues des quatre coins de la francophonie ne peut qu’ouvrir les horizons, amener les lecteurs à découvrir l’aura qui cercle l’ailleurs. Grâce à cette anthologie nous voyageons d’un univers à l’autre par la seule force des mots. Nous parvenons à sentir les odeurs du Marché des épices du Marocain Tahar Ben Jelloun, tout comme la richesse d’une filiation à travers un tout petit poème d’Andrée Chedid intitulé Poursuite du chemin. Le choix des textes, souvent courts, toujours tendres et riches, formés de rimes croisées, suivies, embrassées, permet une belle incursion non seulement dans des univers éclectiques, mais aussi dans la poésie en soi. Près de 70 poèmes s’offrent aux yeux des amoureux des mots. Ces vers sont accompagnés des illustrations candides de Cécile Gambini. Les collages et l’allure enfantine, parfois surréalistes des tableaux appuient la beauté des rimes et, sans tout donner à voir, offrent une parcelle des poèmes. Par exemple, pour illustrer La Rivière de René Depestre et Mi.ssi.ssi.ppi de Jean-Claude Charles, Gambini présente un immense fleuve vert, surmonté de quelques pattes, décoré de grands yeux inquiets et d’un chapeau melon, sur lequel vogue un ancien bateau vapeur. Elle personnifie ainsi le fleuve, lui accordant une voie, une entité. Pour découvrir la poésie francophone d’ailleurs et d’ici, pour voyager simplement en s’arrêtant ici et là, au gré des pages, cette anthologie est tout simplement idéale.
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