Alain Serres, auteur bien connu, préoccupé par les droits des enfants, signe la coordination et la conception de ce recueil atypique, entièrement rempli de paroles d’enfants et d’adolescents de partout dans le monde qui s’expriment sur l’état de la planète - leur planète - mais aussi sur la vie en général, les rêves et l’espoir. Divisé en trois chapitres, contenant chacun une trentaine de courts textes, cet album permet aux lecteurs de découvrir les préoccupations de leurs pairs. Dans « J’entends le monde tousser », ce sont par exemple Alexandra (Sri Lanka), Tasneem et Nicole (Maurice) Pierrot (France), Youssouf et Fatoumata Mariam (Guinée) qui, sensibles, choqués par les changements climatiques, la faim dans le monde, l’inaction des gouvernements, la répartition inégale des richesses, parlent au monde entier. Des jeunes qui vivent, plus que toutes les autres générations auparavant, les bouleversements en cours. Dans le chapitre « Je suis une étoile qui pense », on nous propose des lettres sur la différence, la famille, la violence, l’analphabétisme. En finale, « Je ris, je vis, je rêve » nous invite à découvrir le quotidien de ces jeunes et nous laisse sur une note d’espoir ; allant de textes légers, notamment celui de Timothée qui nous parle de son dégout pour les endives, à des lettres d’amour bien personnelles jusqu’à des missives qui permettent de déconstruire les idées reçues, les jeunes se vident le coeur. On pense par exemple ici à « ceux qui croient savoir », signé Les enfants du quartier (France), dans lequel on dénonce les préjugés envers les quartiers plus pauvres. Des textes modernes, réalistes, vifs qui s’adressent aux jeunes du monde.
Écrits sous forme de lettres, parfois très près de la forme poétique, d’autres fois en prose ou encore sous forme d’historiettes, ces textes émeuvent par leur sincérité. Les jeunes parlent de leur vie, s’inquiètent, s’interrogent, espèrent et, surtout, aiment. Qu’il écrivent « à mon double », « à mon père qui est en mer », « à Monsieur Argent », « aux dames en fourrure » « à mes copains qui n’aiment pas la fumée de l’usine » ou encore « à une petite migrante », ce sont là tous des cris du cœur qui expriment avec force et tendresse de grandes réalités et de grandes réflexions. Chaque poème est présenté dans une typographie et une couleur différente accordant une touche personnelle à chacun. Puis, disposés ici et là sur les pages, entre les lettres, quelques paroles d’enfants, comme des étoiles qui scintillent : « Ma mère, elle dit : Liberté, Égalité, Fraternité, c’est la devise de mes rêves ». Le tout est sillonné d’illustrations de Laurent Corvaisier, des peintures colorées, qui rappellent parfois le cubisme de Picasso, tout comme la puissance de Pierre Pratt dans des textures grasses, des noirs tranchants qui cerclent les scènes et contribuent enrichir le sens. Quelques photographies monochromes présentent des scènes touchantes qui appuient l’intensité des textes. Un très beau recueil.
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