Le fantôme du cirque d'hiver

Billet rédigé par Marie Fradette, spécialiste en littérature jeunesse

« Comment ce singe peut-il refuser de croire à un fantôme dans un lieu aussi chargé d’histoire que le Cirque d’Hiver ? Comment explique-t-il les grincements, les chuintements, les craquements qu’on peut entendre la nuit quand le cirque est endormi ? Mais ce fichu primate me rétorque : « Dans un bâtiment vieux de plus de cent soixante ans, le contraire serait étonnant ! ». Dino le perroquet entraine ainsi son ami Spirit le singe à croire à cette histoire de fantôme qui hante le théâtre. Ils interrogent les animaux du cirque et chacun semble croire à cette présence, avec pour preuve cette histoire d’un trapéziste qui se serait cassé le cou s’il n’avait pas été repêché étrangement et in extremis par une « belle femme jeune et parfumée ». Mais Spirit n’est pas du genre à croire sans voir. Une représentation menée par Marina Ants et ses fourmis savantes lui donneront toutefois une nouvelle perspective. Du moins, pour un moment.

Si les plus jeunes trouveront là une histoire pleine de rebondissements, une intrigue bien ficelée et tenue à bout de bras pas des personnages entiers, les plus grands découvriront ici un lieu mythique, le Cirque d’Hiver conçu en 1852. Un lieu historique dans lequel plusieurs célébrités ont fait des prestations diverses, notamment Le cirque du Soleil.

Mon avis

Dernier album en liste du fabuleux duo Bernard et Roca, Le fantôme du Cirque d’Hiver mélange habilement la fiction et l’histoire, l’intrigue et la légende. Ce cirque, d’abord appelé Napoléon, parce que conçu sous le règne de Napoléon III, a ensuite été acheté par la famille Bouglione, qui en fait un lieu mondialement reconnu.

Dans cette histoire, menée par un perroquet et un singe, on nous plonge dans l’antre du lieu et découvre la magie qui y règne. Si le texte est léger et amusant – les taquineries entre les deux personnages rythment assurément l’ensemble – les illustrations de Roca, ses tableaux, nous invitent à découvrir les coulisses du cirque. Au risque de me répéter, je souligne encore et ici le génie de cet illustrateur chez qui, d’un album à l’autre, le trait ne vacille pas, la création d’atmosphère est toujours aussi juste. Le réalisme du trait se double ici de perspectives inattendues, de détails improbables, d’un jeu de lumière éblouissant captant notre œil et le menant là où il faut. Il faut voir, par exemple, l’éclairage éclatant qui illumine les trapézistes ou encore celui tamisé des couloirs du cirque. C’est précis, juste et finement présenté. Le grand formant ajoute bien sûr à la splendeur de l’ouvrage.

Enfin, l’album se clôt sur une double page dans laquelle est présenté l’historique du lieu depuis sa conception jusqu’à aujourd’hui, où les propriétaires « prolongent le spectacle et la tradition en invitant les plus grands artistes de cirque du monde. » De quoi nous donner envie de le visiter !