« − Comment ça, « la limite des arbres » ?! − Ben oui, au-delà de cette ligne, il n’y a plus un seul arbre qui pousse! − Même pas un petit sapin pour Noël ? » L’illustrateur français Gilles Rapaport s’étonne devant l’immensité blanche qui s’élance devant lui. Et avec raison. Il s’embarque ici dans une traversée singulière dans le Grand Nord Polaire, accompagnant la mission de la journaliste Laurence Pivot. « Latitude 67o 49o 00o Nord, longitude 115o 08o 38o Ouest. Bienvenue à Kugluktuk ! Territoire du Nunavut, Canada ».
Embarquée sur le brise-glace canadien l’Amundsen, la journaliste raconte, avec un immense souci du détail et beaucoup de passion, cette expédition riche en informations de toute sorte. De la vie très organisée sur le bateau, aux paysages vus et à la température polaire ressentie, c’est tout un monde qui s’ouvre à elle et, par ricochet, à nous.
Et Gilles Rapaport dans tout ça ? L’illustrateur, en irréductible citadin, se sent bien loin de son confort : « Dites-moi ce que je fais ici !!!!! Au milieu d’une nature où ne poussent pas un seul immeuble, un seul feu rouge […] Et… Et… Il fait froid, mais froid ». Malgré sa difficulté d’adaptation, il observe, ressent, cogite et surtout dessine offrant ainsi sa vision de l’expédition.
Si l’ouvrage cible les 8-12 ans, les plus grands seront tout aussi happés et intéressés par le thème du Grand Nord et de tout ce qu’il nous apprend sur la santé de notre planète.
Dans un ouvrage qui tient du journal de bord détaillé, Pivot, en observatrice, note ce qu’elle voit avec douceur, étonnement et sensibilité. « On pourrait croire qu’il n’y a rien ici, que de la glace à perte de vue. Mais en fait, c’est comme une immense page blanche sur laquelle je pourrais dessiner tous mes rêves. Moi, qui parle souvent beaucoup, je n’ai subitement plus de mots […] Je suis seule au monde. » La forme personnelle empruntée invite le lecteur à bien sentir l’état de la journaliste, mais aussi l’atmosphère qui règne sur ce bateau de scientifiques, tous préoccupés et intrigués par ce continent de glace. L’abondance de photographies ajoute par ailleurs à l’effet de sens, à l’impression de plonger véritablement au cœur de cet univers polaire.
Les illustrations de Rapaport permettent quant à elles d’observer ce monde d’un tout autre œil. Celui d’un homme totalement secoué par cette immersion, qui a du mal à affronter ce froid, ce monde aride, mais aussi et surtout celui d’un artiste au regard fin et humoristique. Sous forme de bande dessinée, Rapaport se met en scène, affrontant jour après jour les hauts et les bas de cette expédition. Il faut le voir vivre sa première nuit sur la mer agitée, « celle qui bouge vraiment […] celle à côté de laquelle le Space Mountain n’est qu’une attraction pour bébés ».
Grâce à des perspectives totalement différentes, le duo offre un ouvrage documentaire rafraichissant, à la fois riche et amusant en plus d’être visuellement très beau.
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