Toxik

Kellyann est passionnée de hip-hop et un jour, alors que son groupe de danse se démarque lors d’un concours, ses coéquipières et elles sont invitées à se produire durant un rap battle. C’est ainsi que Kellyann découvre l’univers du slam, elle qui a toujours aimé jouer avec les mots, et fait la rencontre de Christophe, un spitter au grand potentiel… et au charme certain. Pendant la soirée, devant un concurrent particulièrement macho, Kellyann réagit impulsivement et monte sur scène pour lui lancer un défi. Mais elle panique ensuite, persuadée de ne pas être capable d’écrire un texte à la hauteur. C’est alors que Christophe lui propose une solution. Pourquoi ne pas faire comme lui et prendre une « aide », médicament qu’elle a justement sous la main puisque son frère souffre d’un TDAH ?

Emmanuel Lauzon s’intéresse à l’univers des drogues dures à des fins de performance, à la spirale particulièrement malsaine des stimulants et des relaxants, mais aussi à l’amour, à la force des mots et à l’adolescence en général dans ce récit paru dans la collection Tabou. Visant un public avisé, il est écrit dans une langue accessible.

Mon avis

Après La rage de vivre et Taguée, Emmanuel Lauzon signe avec Toxik son meilleur roman pour adolescent. On sent l’évolution dans l’écriture comme dans la construction du récit. Les phrases sont plus fluides, le vocabulaire est diversifié (tout en restant parfaitement crédible) et l’auteur s’amuse ici avec la langue grâce aux divers slams des personnages (à écouter dans la vidéo ci-dessus aussi!).

C’est le récit qui est toutefois le plus fort. Le cadre est réaliste : Kellyann est déjà fragilisée par des parents absents, un père très exigeant, et puis elle tombe amoureuse, ce qui fait qu’elle a envie d’essayer plein de choses et se retrouve plus vulnérable. D’ailleurs, Emmanuel Lauzon a habilement évité les clichés : la relation entre Kellyann et Christophe est certes malsaine puisqu’elle entraine Kellyann vers des risques de plus en plus grands, mais il n’est pas question de violence conjugale, de prostitution, autant d’éléments qui auraient rendu le portrait trop sombre et changé le message. Ici, on se concentre sur le parcours de Kellyann et sur toute la difficulté de s’en sortir justement parce que son amoureux est gentil et qu’elle est bien avec lui.

Si j’ai seulement serré les dents un peu devant un brusque retournement dans la réaction du père à la toute fin, l’ensemble du roman est vraiment bien mené : crédible, accrocheur, authentique. Chapeau.