Un homme entre par effraction sur un chantier de construction et grimpe dans la cabine d'une grue. Ce qu'il souhaite, c’est d’attirer l'attention afin d'obtenir justice et pouvoir revoir sa fille Camille, qui vit à 800 km, chez sa mère. Pour attirer l'attention, c’est réussi! En voyant son père à la télévision, l'adolescente de 13 ans ne sait qu'en penser, prise entre deux parents qui se détestent. « Ton abruti de géniteur a encore fait des siennes », s'étonne à peine la mère. Mais une fois les premières émotions passées, les trois membres de cette famille éclatée comprennent qu'un point de non-retour a été franchi : il faut maintenant affronter ses démons.
L'homme de la grue est un court roman réaliste, inspiré d'un fait divers, qui traite des relations familiales difficiles, de violence familiale et de relations parent-enfant, raconté avec l'alternance d'une narration extérieure qui suit le père et d'un récit à la première personne pour Camille. Parfois cru, il convient aux adolescents de douze ans et plus.
Éric Sanvoisin propose un récit intimiste et sans complaisance à ses lecteurs avec l'Homme de la grue. En fait, on ne peut pas dire qu'il épargne les adultes. Pétrifiés par leurs déceptions, leurs colères et leurs peines, les parents de Camille se méprisent l'un l'autre, au grand désespoir de leur fille, première victime de leurs chicanes, elle qui les aime tous les deux. Et derrière leurs gestes pour leur enfant, on voit constamment l'ombre de leur égoïsme. Comme lecteur, j’ai parfois trouvé ces passages psychologiques plutôt lourds.
C'est autant dire que le statu quo était insoutenable. L'épisode de la grue constitue donc ce catalyseur tant attendu par l'adolescente. Bien que décontenancée par l'ampleur des évènements, quand sa nouvelle amie Violetta – qui vit elle aussi seule avec sa mère, en fuite de son père violent – lui demande si elle est fière de son père et l'aime, Camille ne peut qu'acquiescer. Au moins, et c'est le principal, il pense à elle et ne peut se résoudre à ne plus la voir.
Tout au long du court roman, les tensions sont palpables, alimentées par l'alternance des deux récits. Est-ce légitime de lutter pour son oxygène en perturbant l'ordre et par le chantage? Et l'est-ce davantage de refuser à son ex-mari le droit de voir sa fille parce qu'il a agi en véritable con? Cela fait réfléchir le lecteur, mais, au final, on comprend que Camille, elle, se moque de la portée de ces réflexions et de tout ce cirque. Grâce à Violetta et à ses franches discussions avec sa mère, elle réussit à accepter les faits et lutte pour tempérer ses parents. Tout ce qui compte, c'est savoir pardonner et être avec ceux qu'elle aime. N'a-t-elle pas raison?
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