À l’aube de son dernier concert, Maestro Moshar revient sur l’adolescent qu’il était et le moment charnière où il a failli abandonner la musique, incapable de se permettre d’être qui il était vraiment. Timide et solitaire, François s’était caché derrière trois murs pour arriver à survivre dans la faune de son école secondaire. Sa laideur d’abord, un mur qui ne donnait envie à personne de l’approcher. Son piano ensuite, l’instrument lui prenant la moitié de sa vie, l’isolant des autres. Finalement, son refus d’être soi, d’être lui, d’être gai. Sauf que l’arrivée de Frédéric Satie est venue bouleverser les choses et lui a donné envie de sortir de sa cage. Mais pouvait-il vraiment se permettre de vivre cette histoire, au risque de laisser les autres l’approcher, lui faire mal ? Et comment parvenir à être un véritable pianiste d’exception si on n’est que la moitié de soi-même ?
Pierre Desrochers utilise le thème de la musique, et plus particulièrement du piano, pour parler d’intolérance, que ce soit à l’école, en famille ou envers soi-même. Écrit dans une langue soignée, assez lent, le roman s’adresse aux grands lecteurs.
En commençant ce livre, je me suis demandé quel public visait le roman. En effet, au début et à la fin du roman, François Moshar est un homme de plus de quatre-vingts ans, à la langue riche et évocatrice (mais à l’esprit un peu perdu au départ), un personnage qui me paraissait très « adulte ». Mais ce n’est que l’Ouverture (le livre respecte les différents temps d’une œuvre musicale, ce qui est très chouette), et dès le premier mouvement, on revient à l’adolescence de François. Dès lors, oui, les thèmes parlent plus à un lectorat adolescent, mais la langue reste ampoulée, le personnage de François étant un peu hors du temps (le récit est difficile à situer dans le temps, d’ailleurs, on a l’impression que Maestro Moshar vit de nos jours, mais que l’adolescent qu’il était aussi). Si je peux concevoir que c’est le François adulte qui raconte l’histoire à son assistante, n’empêche que j’ai plus ou moins cru aux personnages ados qui, même dans les dialogues, semblent souvent plus âgés. Fred est sans doute le plus réussi, pris dans ses tourments, avec ses réactions vives et instinctives. Sa relation avec sa sœur est intéressante, tout comme celle qu’il entretient avec son père et qui vient offrir une nouvelle facette au thème de l’intolérance. Mais François, lui, semble englué dans ses murs et n’est pas très sympathique, on le secouerait volontiers à quelques reprises. Sa relation avec ses parents est quasi absente du roman et son maitre de piano, plein de fougue, revient un peu trop souvent sur les mêmes points. Bref, je ne suis pas convaincue même s’il y a de jolies choses dans ce récit, entre autres la fin, douce, qui offre un baume et toute cette écriture « en musique » est ingénieuse et bien pensée.
En bref? Un roman qui plaira aux amateurs de récits plus profonds... et à ceux qui aiment la musique!
Ce billet parait dans le cadre de la rubrique « mercredis réservés ». Soulières éditeur a commandité cette critique tout en laissant son contenu complètement libre. Les avis de Sophielit.ca sont toujours personnels et une bonne critique ne peut s’acheter!
Sophielit est partenaire des Librairies indépendantes du Québec (LIQ). Cliquez ici pour plus d'informations sur ce partenariat.
Nouveau commentaire