Après combien de temps on meurt, si on arrête de respirer ?

« C’est tellement sauvage, le secondaire » pense la tante de Lara. L’adolescente, elle, essaie surtout que ce soit le moins pénible possible et sa technique (infaillible jusqu’ici) est de passer sous le radar. Ne pas laisser savoir que sa mère est la directrice de son établissement scolaire (surtout pas), naviguer entre les deux caractères forts de ses meilleures amies sans faire de vague (c’est plus simple), se tenir loin des problèmes. Sauf que, quand sa culotte dévoilée par sa jupe remontée sous son sac se retrouve sur la page Spotted de l’école lors de la première journée de cinquième secondaire et que sa meilleure amie s’en prend à elle parce que son crush fait des blagues sexuelles à Lara, l’adolescente comprend que la discrétion, cette fois-ci, ce ne sera peut-être pas possible…

Avec ce récit qui vise un public avisé et parle d’amitié et d’amour, mais aussi de sexualité, d’agressions et de la limite de l’intimité sur les réseaux sociaux, Florence Darveau s’interroge aussi intelligemment sur la position du témoin.

L’avis de Sophie

Alors là, ce livre détonne dans le paysage québécois, et ça fait du bien. Si vous avez aimé les livres du genre Nous les filles de nulle part et Moxie (aussi devenue une série télé), vous pourriez bien craquer pour ce roman qui ne fait pas dans la demi-mesure, ni dans ce qui est présenté (loin d’Euphoria quand même) ni dans le ton.

En effet, les « esti »suivent les expressions anglaises, les « what if » se glissent dans les phrases sans italique et on a l’impression au fil de la lecture de se promener dans un réel corridor d’école secondaire ou de cégep, alors que l’autrice a décidé tout simplement de normaliser la langue utilisée par ses personnages… mais pas que. Les comportements des ados sont aussi rendus sans gants blancs, voire bien au contraire. Parce que si Lara se questionne sur sa normalité, elle qui préfère toujours disparaitre que prendre sa place, et qu’il y a bien Félix qui semble être plus nuancé, voire pertinent, les personnages de ce roman n’ont pas froid aux yeux. Backstab entre amies, photos déplacées postées en ligne, mains sous les jupes dans les couloirs, allusions pas du tout subtiles, GHB.... C’est à la fois réaliste (et pas assez montré dans d’autres livres visant ce public plus âgé), mais aussi parfois à la limite de la caricature, limite que les personnages d’adultes, eux, atteignent, voire dépassent.

Oui, ces adultes sont dépeints par une adolescente qui n’en voit souvent qu’une facette, mais il n’en demeure pas moins que tous ont l’air absolument incompétents, à commencer par la mère de Lara, aussi directrice de son école, qui manque un peu de cohérence dans ses actions et semble seulement servir à attiser la colère de sa fille, peu importe la situation.

De façon générale, l’écriture est fluide et accrocheuse et, s’il ne se passe pas grand-chose en matière d’action dans ce premier tome, on traverse avec l’héroïne une montagne russe d’émotions, ce qui fait qu’on referme difficilement le roman en cours de lecture malgré quelques maladresses, des petites incohérences dans l’écriture. Lara est un personnage consistant, intéressant à suivre (même si parfois on a envie de lui botter le cul). J’aurais toutefois aimé qu’on sente que celles et ceux qui l’entourent ne sont pas faits que pour servir les scènes, qu’ils ont une vie aussi. Par exemple, les meilleures amies qui manquent de nuances pour que leurs actions, pas toujours claires, soient plus crédibles. Peut-être que ça viendra dans la suite ? Dans tous les cas, je la lirai assurément !  

Merci aux éditions Le parc d'en face pour le service de presse !