Dans le bureau du docteur B. où America se retrouve suite à une tentative de suicide, l’adolescent mène une chaude lutte aux souvenirs qui tentent de remonter en réponse aux questions efficaces du psychologue. Et si America fait son dur et refuse d’abord de parler, les éléments de son passé remontent tranquillement à la surface. D’abord la sécurité dans la maison de Mme Harper, puis le violent retour chez sa mère toxicomane, l’apprentissage de la violence nécessaire à sa survie, les abus, la fuite et l’envie de tout abandonner. C’est pourtant en faisant face qu’America a une chance de s’en sortir…
Je m’appelle America est un livre dur qui nous plonge dans la réalité d’America, un jeune homme qui a connu l’enfer à de trop nombreuses reprises, mais qui nous montre aussi toute sa reconstruction. Dans un style rythmé par l’utilisation du « je » et les allers-retours fréquents entre passé et présent, E.R. James rejoindra tous les niveaux de lecteurs.
Je m’appelle America est vraiment une lecture difficile, non pas à cause du style, très fluide, aéré, rythmé, mais bien parce qu’il est question de réalités qui font frissonner.
Dépressif, incapable d’affronter les souvenirs qu’il a enfouis profondément dans son esprit, America lutte tout d’abord férocement, mais il a en même temps un profond besoin de se lier à quelqu’un et c’est en se livrant peu à peu qu’il le fait. On sent tout de même que la relation entre l’adolescent et le psy est fragile et qu’ils marchent sur une fine ligne, tout comme le lecteur d’ailleurs. En effet, la tension est très présente et j’ai eu l’impression tout au long de pouvoir perdre mon équilibre à chacune des pages tant l’écriture est dense et tant les souvenirs sont douloureux.
L’auteure a travaillé longtemps auprès d’adolescents en difficulté et, si America est un personnage, il est criant d’authenticité. En fait, on sent les multiples personnes réelles qui se cachent derrière lui et on croit d’autant plus à son histoire. En outre, on ne tombe pas dans les stéréotypes et on découvre une foule de nuances, de zones de gris tant dans les émotions que vit America que dans les personnes qui croisent son chemin. Il est question de toxicomanie, d’abus de confiance, de violence, d’abus sexuels… mais les « méchants » ne sont pas juste unidimensionnels, ils ont aussi une histoire, souvent bien malheureuse aussi.
Le petit plus? J’ai beaucoup aimé le regard qu’America porte sur la méchanceté. Celle des autres, mais aussi la sienne, celle qu’il imagine si forte qu’il ne peut permettre aux autres de l’approcher. C’est un aspect souvent négligé dans les romans traitant de sujets difficiles et c’est vraiment intéressant de découvrir ce que cela crée chez America.
En bref? Un roman fort et puissant, pour lecteurs avisés !
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