Le père de Flora est conservateur au Musée national des beaux-arts du Québec et rêve de pouvoir guider une visite de la collection. Sauf qu’il est narcoleptique et que s’endormir à n’importe quel moment, c’est loin d’être idéal quand on est un guide! Qu’à cela ne tienne, Flora est déterminée à lui permettre de réaliser son rêve à l’occasion de ses 40 ans. Elle va donc se familiariser avec l’œuvre de Jean-Paul Riopelle et découvrir l’existence des automatistes. Toutefois, au même moment, une série de graffitis rappelant l’œuvre de Banksy fait son apparition un peu partout dans l’école que fréquente Flora. Et son intérêt soudain pour l’art contemporain fait d’elle la principale suspecte.
Tache de mayo et graffitis est un court roman à la mise en page dynamique qui s’adresse aux lecteurs intermédiaires de 11 ans et plus
Tache de mayo et graffitis est le troisième roman d’Émilie Rivard publié dans la collection Zèbre, dont la particularité est de proposer un graphisme unique et adapté à chaque roman. Et avec Riopelle et Banksy comme toile de fond, disons qu’on est servi!
L’idée de départ, un conservateur de musée narcoleptique qui rêve de guider une visite, est excellente. En plus, on s’intéresse à Riopelle et aux automatistes derrière le Refus global, un sujet très rarement abordé en littérature jeunesse. Le principal problème est qu’on s’éparpille un peu trop pour que tout fonctionne de manière efficace dans le cadre assez strict de la collection Zèbre. Celle-ci demande en effet des romans qui font une centaine de pages et qui permettent des ajouts graphiques et une mise en page éclatée, ce qui réduit d’autant l’espace disponible pour développer une intrigue. Tout ce qui entoure la ligue d’impro de Flora, par exemple, aurait pu être coupé sans nuire au récit.
Par contre, dès que l’autrice aborde l’œuvre de Riopelle, ou qu’elle s’interroge (à travers le personnage de Flora) sur la légitimité de l’art urbain et sur l’appréciation de l’art abstrait, là on tient quelque chose de fort. Les réflexions de l’adolescente font mouche et ses recherches sur les automatistes nous donnent envie de découvrir l’œuvre de l’une des figures artistiques les plus importantes du Québec contemporain.
À ce sujet, les commentaires sont sensiblement les mêmes pour les ajouts graphiques typiques de la collection. Certaines illustrations, plus générales, sont moins pertinentes, voire décevantes (la carte sur l’illusion d’optique avec la belle femme et la vieille femme). Par contre ceux qui abordent l’œuvre de Riopelle ou de Banksy touchent droit au but et sont tout simplement magnifiques. Mention spéciale aux graffitis dans la salle de bain et à « Riop »!
J’aime aussi le fait qu’Émilie Rivard trace un parallèle entre Riopelle et Banksy, en comparant non seulement leur pratique artistique, mais aussi la volonté derrière leurs œuvres. Et l’affaire du graffiteur mystère permet en outre de mettre en lumière la nécessité pour les autorités (scolaires, municipales ou autres) de donner un espace d’expression aux artistes urbains. Parce que oui, les graffitis peuvent être une forme d’art légitime.
Voilà donc un roman qui, malgré certains défauts, demeure drôle et efficace, en plus de susciter des discussions autour du rôle de l’art dans nos vies. Et qui sait s’il ne provoquera pas un regain d’intérêt pour les magnifiques œuvres de Jean-Paul Riopelle?
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