Mauve se réveille dans une brocante. Il n’a aucune idée d’où il est, ni de qui il est. Juste ce nom, Mauve. Qui était sa couleur. Mais désormais, sa peau est noire et ses souvenirs, disparus. Peu à peu, au contact de Lucie, qui l’accueille, d’Anna, qui lui explique le plus important, d’André, qui lui ouvre les yeux sur le monde qui l’entoure, Mauve retrouve des souvenirs. D’un monde lisse dirigé par l’Oracle, une intelligence artificielle, d’où le « je » est absent, interdit. Où, pour la paix de tous, on a sacrifié les désirs personnels. Un monde dans lequel Mauve s’est rebellé, ce qui lui a valu d’être condamné à l’exil. Sur Terre. Où il découvre la fragilité des humains, mais aussi leur quête de bonheur. Et le danger de leur désir de confier leurs vies à des intelligences artificielles de plus en plus fortes…
Avec ce roman d’anticipation, Stéphane Michaka fait des clins d’œil à plusieurs classiques (Le meilleur des mondes et 1984, par exemple) et pose à la fois la question du futur que celle de l’actualité, interrogeant le besoin de chacun de se sentir unique, mais aussi l’importance de faire partie d’un tout. Pour grands lecteurs.
Il y a beaucoup de poésie dans l’écriture de Stéphane Michaka, une fluidité certaine dans sa façon de livrer un récit, tout aussi complexe soit-il. On est en effet ici encore dans un récit sous forme de puzzle, alors que le lecteur fait des découvertes au fur et à mesure que les souvenirs de Mauve reviennent à la surface. Alors que le début est plus flou (D’où arrive-t-il? Que fait-il dans cette brocante? Dans quel but? Pourquoi a-t-il tout oublié? Qui est cette fille qui lit dans ses pensées comme lui semble capable de lire dans celles des humains?), plus le récit progresse et plus on tombe dans l’anticipation pure, avec cet Oracle qui, sous couvert de beauté et de paix, a installé un système qui n’est pas construit « pour » les êtres humains, mais « par » eux. Et qui a annihilé toute la notion d’individualité. Notion que Mauve, sur Terre, doit comprendre pour arriver à reconstruire la sienne.
On est à la fois dans un récit de science-fiction et dans une œuvre philosophique, à la fois dans l’aventure et dans le politique. S’il y a quelques longueurs, le récit est ponctué de plusieurs rebondissements et d’histoires parallèles qui rendent la lecture captivante. Ce qui en ressort, au final, c’est que l’humanité, malgré ses travers et le choc de ses individualités, doit se faire confiance et ne pas s’en remettre à la rationalité totale. Parce qu’elle pourrait bien disparaitre. Sombre, dites-vous? Peut-être… mais il n’empêche que c’est une lecture qui donne aussi espoir.
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