Il y a des semaines que les incendies font rage à proximité, mais ce matin-là, l’ordre d’évacuation est donné. Dans la précipitation du départ, Mike Wazowski, le chien de Cara, disparait.
« Probablement qu’il a sauté
par-dessus la stupide clôture
à la recherche d’un endroit plus frais. »
Forcée par son père à embarquer dans la voiture sans son meilleur ami, Cara cherche ses repères. Dans la maison des Bains, famille d’accueil qui les héberge le temps que les autorités en sachent plus, puissent les relocaliser, la jeune fille tente de trouver ce qui peut bien lui offrir le réconfort et la sécurité d’un « chez-soi » si elle n’a plus ni les murs de sa maison ni son chien…
Roman en vers libres, Où es-tu ? parle de délocalisation, de résilience, de famille et du lien si fort qui peut se créer entre un humain et un animal domestique. Mettant en scène une héroïne de 10 ans et écrit dans une langue accessible pour un jeune lectorat, il parlera aussi aux lecteurs plus âgés par la force des émotions qui y sont transmises.
C’est la première fois que je lis une œuvre de Shari Green, mais je me promets que ce ne sera pas la dernière. Oui, j’ai un petit penchant pour les romans en vers ces temps-ci, mais c’est aussi que celui-ci est très fort.
Le récit s’intéresse à la réalité des familles déplacées : la précipitation et le choc du départ, les lieux plutôt impersonnels où ils arrivent, la précarité, le besoin de s’accrocher à des petites choses, de trouver des repères, le vide en soi quand on n’a plus de « chez-soi », mais aussi l’espoir, la gentillesse des bénévoles, l’aide mise en place. C’est encore plus touchant parce qu’on le voit des yeux d’une jeune fille, et parce que celle-ci vit en plus un déséquilibre plus grand avec la perte du chien. Ses parents ont mille autres choses en tête, la maison, les emplois, la survie, mais Mike est le centre de son univers à elle et, au fil des pages, Shari Green renforce cette impression en racontant comment Mike est arrivé dans la famille, comment il atténue les insécurités de Cara, qu’on devine assez isolée, timide.
La forme est aussi réussie. Le rythme narratif, la fluidité de la lecture (qu’on doit par ailleurs dans sa version française au talent de traductrice d’Andrée Poulin), et le fil rouge de la recherche des mots, un peu à la manière des mots croisés, qui ponctuent le livre. « Fille qui abandonne son chien : Méchante », « Mauvais pressentiment : Angoisse », mais aussi et surtout la quête de mots pour décrire un chez-soi, définition qui varie selon les gens. Impossible de suivre la quête de Cara sans s’intéresser à notre propre rapport à cette question. Qu’est-ce que chez-soi ? Et comment recréer les sentiments qui accompagnent ce « chez-soi » quand on est en déséquilibre ?
Vraiment, un récit qui marque. Chapeau !
Sophielit est partenaire des Librairies indépendantes du Québec (LIQ). Cliquez ici pour plus d'informations sur ce partenariat.
Nouveau commentaire