1945. La guerre est terminée, oui, mais elle laisse derrière elle des humains brisés. Après avoir survécu à l’enfer des camps grâce à ses mains de fée, Zofia ne veut pas rester dans cet hôpital où on tente de prendre soin d’elle, de son corps, de son esprit. Parce qu’il y a cette promesse qu’elle a faite à son jeune frère Abek, « Je te retrouverai », et qu’elle doit absolument tenir. C’est ainsi qu’elle se rend dans sa ville natale, aidée par un soldat russe. Les murs de l’appartement familial y sont toujours, oui, mais Abek n’y est pas. Et si Sofia pourrait se contenter d’écrire des lettres comme elle le faisait à l’hôpital, et les envoyer partout, dans les camps des organismes internationaux, elle sent, elle sait, qu’elle doit se rendre sur place. C’est ainsi qu’elle reprend le chemin de l’Allemagne…
Abordant le sujet de l’après-guerre pour les Juifs dans leur quête pour retrouver les leurs, pour retrouver une normalité, mais aussi pour tous ceux qui ont été meurtris par la guerre, qui tentent de se reconstruire, Monica Hesse tisse un récit d’une grande sensibilité pour les lecteurs intermédiaires et avancés.
J’ai découvert Monica Hesse grâce à Une fille au manteau bleu, qui traçait un portrait juste et déchirant de la réalité aux Pays-Bas durant la Deuxième Guerre mondiale (un pendant vraiment intéressant à Anne Frank). J’avais donc déjà un apriori positif au moment de commencer cette lecture et je n’ai pas été déçue : ce livre-ci est même encore meilleur.
En effet, Monica Hesse raconte ici la suite, la réalité d’une multitude de personnages qui ont tous vécu des choses fort différentes durant la guerre et qui doivent se reconstruire peu à peu dans un monde où l’information est difficile à obtenir (à des lieues de notre vie actuelle). Même si on se concentre sur le personnage de Zofia, elle fait de multiples rencontres au fil de sa quête, ce qui crée une mosaïque impressionnante d’histoires, de récits.
J’ai lu vraiment beaucoup de romans jeunesse sur la Deuxième Guerre mondiale, mais très peu sur ce thème de l’après. Il y a bien Orphelins 88 de Sarah Cohen-Scali, mais le regard y était différent (quoique très intéressant, je vous le conseille), le point de vue aussi alors qu’on met l’emphase sur les troubles de la mémoire, sur le cerveau qui « saute » par moment pour protéger des pires horreurs et qui continue parfois de cacher des choses même après que la menace soit disparue. S’il y a des retours en arrière qui permettent de découvrir des scènes qui se sont produites dans les camps, Monica Hesse reste assez pudique et se concentre sur le présent, cet après Libération qui comporte encore tellement d’embuches.
C’est un roman qui possède une grande force émotionnelle et qui percute ses lecteurs. Grâce à la fragilité de Zofia, à l’importance de sa quête, oui, mais aussi dans son dénouement, dont je ne dirai rien de plus pour ne pas divulgâcher, mais qui est si habilement amené et si puissant. C’est le genre de livre qui appelle une pause après la lecture de sa dernière page, une lecture nécessaire, riche, profonde qui marque l’esprit. À lire !
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