Fab n’a pas écouté quand ses mères le lui ont annoncé, trop occupé à regarder la tache sur le mur et trop concentrée pour ne pas pleurer, mais elles déménagent. Toutes les trois. Suite au divorce, Manmi va vivre à Rouyn-Noranda tandis que Mamou part pour Rimouski. Et Fab, elle ? D’abord six mois d’un côté, puis six de l’autre, loin de sa meilleure amie et de ses repères.
C’est ainsi que ses rêves de création littéraire s’envolent quand elle se retrouve obligée d’intégrer une école secondaire de Rouyn où elle se fait rapidement une ennemie de marque et se voie forcée d’intégrer la concentration improvisation alors qu’elle déteste plus que tout se mettre de l’avant. Isolée, Fab va tenter de devenir invisible… avant de comprendre qu’il n’y a qu’elle qui peut changer la situation.
Emilie Ouellette va là où on ne l’attendait pas suite à son premier roman, L'après, ancré dans un monde postapocalyptique, alors qu’elle propose cette fois un récit réaliste qui parle d’intégration, de différence, d’intimidation, de racisme, mais aussi d’homoparentalité et, surtout, d’impro. Pour tous les lecteur.trice.s.
J’avoue que j’attendais celui-ci avec impatience, ayant été conquise par l’Après, et je n’ai pas été déçue par ma lecture. Si je pense qu’au final j’ai préféré le premier roman parce qu’il se distingue vraiment de ce qu’on fait au Québec (et qu’on croule un peu sous les romans de type psychologie-miroir), j’ai quand même pris énormément de plaisir à ma lecture, notamment parce que son roman aux accents de « déjà vu » possède une originalité certaine.
Oui, des histoires d’ados qui déménagent, arrivent dans une nouvelle école et deviennent la tête de turc, obligés de manger dans les toilettes ou de raser les murs, ce n’est pas nouveau et ça aurait pu gouter le réchauffé, mais Emilie Ouellette a su donner à son histoire sa touche personnelle. D’abord via les deux mères de Fab, l’homoparentalité étant abordée de front dès le départ. C’est normalisé, ça fait partie de son quotidien, mais on sent aussi que ça peut entrainer certains jugements. Puis, Fab est métisse et Manmi noire, ce qui modifie aussi leur rapport au monde extérieur. Oui, même s’il y a progrès, la couleur de peau fait encore réagir et plusieurs préjugés perdurent (ici, j’ai beaucoup aimé la scène avec le directeur, notamment, et la réaction du prof d’impro).
Finalement, il y a aussi et justement l’impro au coeur du roman, une discipline dont on parle peu en littérature jeunesse et qui pourtant a de nombreux adeptes (et de nombreuses vertus aussi, notamment pour les timides, j’en sais quelque chose). Si vous ne connaissez pas les règles de l’improvisation, tout est expliqué, rassurez-vous, sans que ça devienne lourd pour ceux qui en sont des adeptes. Parce que c’est surtout l’impact de l’impro sur Fab qui est intéressant de suivre : son sens de la répartie, sa facilité à créer des histoires qui trouve un nouveau canal. Et ça donne une chouette saveur à ce roman qui, même s’il aborde certains thèmes plus difficiles, est fluide et rempli d’humour tout en faisant réfléchir. On aime !
Pssst, la suite est sortie : L'étoile !
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