Stella, qu'est-ce que tu fais là ?

Stella n’en croit pas ses yeux quand, lors de son premier jour en troisième secondaire dans sa nouvelle école, elle se retrouve intégrée à la bande des populaires. Celle qui a toujours été discrète et qui était un peu mise à l’écart à cause de ses vêtements généralement défraichis est protégée par l’uniforme scolaire qui la met sur un pied d’égalité avec les autres. Mais l’attention que lui porte Zoé lui attire bientôt les foudres de Gabrielle. Et quand Stella se rend compte qu’elle a peu d’affinités avec le groupe et se rapproche de la solitaire Yasmine, Gabrielle lance les hostilités. Il y a d’abord la violence psychologique, puis la violence physique et Stella sombre. Incapable de recevoir de l’aide à la maison, alors que ses parents préfèrent s’engueuler que lui acheter ne serait-ce que des cahiers neufs pour démarrer son année, encore davantage malmenée à l’école quand elle cherche à obtenir l’aide d’un prof, l’adolescente s’enfonce dans la dépression.

Avec ce roman réaliste, Sandra Sirois parle d’intimidation, de famille dysfonctionnelle et de dépression dans une intrigue qui est tout de même ponctuée de pointes de lumière. Pour tous les lecteurs.

L’avis de Sophie

Il y a vraiment beaucoup de romans psychologiques où un élève change d’école au Québec, terreau fertile pour les situations problématiques. Si on peut avoir l’impression que c’est parfois redondant, certains ressortent du lot, comme celui-ci, même si mon avis n’est pas que positif.

En effet, côtés négatifs, le niveau de langue n’est pas toujours constant et certains mots comme « placoter » sont vraiment étranges dans la bouche d’un ado. Stella sait aussi des choses trop rapidement. Une élève à la peau noire ? Elle la présente comme « afro-canadienne », même si ses origines pourraient être différentes. Un chien imposant et court sur pattes ? La ligne suivante, elle parle d’un corgi. On sent donc fréquemment l’adulte derrière, tout au fil du récit, mais aussi et surtout à la fin, quand Stella intellectualise vraiment beaucoup la situation, comprenant très rapidement le déroulement de sa chute libre et l’expliquant au lecteur de façon très rationnelle. Je n’ai donc pas tant cru à la voix de l’ado.

Toutefois, il y a du très bon dans ce roman qui traite d’intimidation. Sandra Sirois n’a pas peur de montrer que certains gestes posés par les ados ne sont vraiment pas doux. Il y a des paroles, oui, mais aussi de la violence physique quand Stella ose dénoncer celui qui lui a collé de la gomme dans les cheveux. La scène dans l’autobus est déjà forte, mais celle dans les vestiaires du cours d’éducation physique (et qui se rapproche davantage de l’agression sexuelle) est particulièrement percutante. C’est dur et c’est rare que ce soit montré de cette façon en littérature jeunesse au Québec, mais c’est aussi la réalité et, il me semble que c’est pertinent de la mettre en scène. De se questionner sur le rôle des témoins qui assistent aux scènes sans réagir, parfois parce qu’ils trouvent ça drôle, souvent parce qu’ils ne veulent pas se retrouver pris à partie à leur tour.

J’ai aussi apprécié tout le volet autour de la famille dysfonctionnelle, une réalité encore là trop peu exploitée. Les deux personnages de parents sont bien campés et cela explique à quel point Stella sombre dans la dépression alors qu’elle est si seule, les adultes responsables s’entredéchirant pour un tout et un rien, préférant s’engueuler que de l’aider. Bref, même si j’ai relevé ici quelques éléments moins bien réussis, c’est un roman intéressant pour aborder le thème de l’intimidation, un de ces titres plus « punchés » qui accrochent souvent les lecteurs !  

Merci aux éditions Hurtubise pour le service de presse !