La mère de Lili sait qu’il y a quelque chose qui ne va pas, mais sans savoir ce que c’est exactement. Après tout, elle a seulement dit à sa fille que Mondjo était désormais son amoureux et qu’il viendrait vivre avec elles. Et elle devrait être contente, elle l’adore !
À l’intérieur de la tête de l’adolescente, c’est la panique. Parce qu’elle ne peut pas dire à sa mère que ça fait sept ans maintenant que Mondjo lui fait des gouzgouz. Qu’à huit ans il lui a montré ce qu’était l’amour, qu’à dix ans il lui a promis de l’épouser et qu’encore aujourd’hui, il la possède toute entière, de corps comme d’esprit.
Dans un récit où la forme déconstruite et les phrases courtes, parfois mal emboitées au départ, fait écho au fond, Claire Castillon donne voix à Lili, tantôt adolescente, tantôt enfant, aux prises avec un agresseur habile. Un livre qui peut faire œuvre utile, pour un lectorat avisé.
Ouf. Attention, ce livre est nécessaire et utile, mais aussi terriblement difficile à lire. J’ai été séduite par La porte de la salle de bain, sur le même sujet, mais en plus doux, et j’ai vraiment un coup de coeur pour ce roman-ci, mais c’est aussi une lecture perturbante, douloureuse par moment, il faut le savoir. Si Claire Castillon fait preuve de réserve dans la description des sévices, utilisant des mots différents, à hauteur de l’enfant qu’était alors Lili, pour décrire certaines réalités, comme la « barre » de Mondjo et le « Mondjo-liquide » qui sort parfois de son corps, les images restent frappantes.
L’histoire est racontée en fragments, entre le présent, alors que sa mère annonce à Lili le déménagement de Mondjo et que l’adolescente est en panique, entre la peur et l’amour, encore sous son emprise, et le passé, alors qu’on assiste aux premiers abus. On accompagne tout au long l’héroïne jusqu’à ce que ce soit trop, qu’Alice tente de s’en sortir, de libérer Anna, son double, la petite fille soumise et prisonnière du cercle, mais engluée dans les promesses, les mensonges, les menaces, et on comprend aussi comment l’homme a construit le piège et comment celui-ci semble impossible à briser.
Trop d’enfants subissent ces abus et ne voient pas les mécanismes. Si ce livre peut leur montrer qu’iels ne sont pas seul.e.s, c’est important. Il y a des scènes douloureuses à lire, mais aussi de l’espoir. Et cette image forte, quand la Lili de 15 ans rencontre Hortense, 10 ans, et prend conscience de toute son ingénuité. De sa légèreté. De ce que le monstre lui a volé. Percutant, vous dites ? Ouf !
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