Neuvième sur la liste

Nora voudrait effacer ce souvenir de sa mémoire. Ne s’être jamais réveillée, nue, sur le terrain de golf. N’avoir jamais vu sa culotte flotter au vent sur un drapeau. N’avoir jamais découvert le chiffre neuf tracé sur la peau de son entrejambe. Après, tout, elle n’a pas été violée, non ? Alors pourquoi ne peut-elle pas juste oublier ?

Mais c’est sans compter sur la vidéo tournée par Adam Xu, quand il a fait fuir ses agresseurs avec son bâton de baseball. Sans compter sur sa meilleure amie Cam, qui refuse de ne pas réagir. Et sans compter sur Faber et ses traditions. Parce que Nora n’est pas la seule… et que si elle veut que ça s’arrête, elle va devoir faire face à la vérité. Toute la vérité.

Neuvième sur la liste est un récit d’enquête qui s’intéresse à la culture du viol dans certaines écoles et université, notamment autour de la question du bizutage. Rythmé par l’alternance des points de vue et les révélations, il vise un public intermédiaire, mais avisé !

L’avis de Sophie

Pour être tout à fait franche, je me suis fait avoir par la couverture et le résumé du livre, alors que je pensais découvrir un thriller (et des morts) et que ce n’est pas le cas. Toutefois, il y a bien une enquête, autour de la culture du viol qui sévit toujours dans de nombreux endroits, et elle est brillamment orchestrée au fil du texte, avec des révélations surprenantes qui viennent ajouter une couche d’émotions (et de réflexion) à l’ensemble.

Je dois quand même vous aviser : au départ, les personnages principaux sont entiers et coincés dans des émotions brutes, ce qui peut faire en sorte qu’on a un peu de difficulté à s’y attacher dans les premiers chapitres. Nora est dans le déni et Cam, elle, veut trop, elle ne tient pas compte du ressenti des autres. Heureusement, Adam et Asher, les deux personnages secondaires masculins, sont plus nuancés et leur présence permet de tempérer l’ensemble jusqu’à ce qu’on accroche vraiment, notamment quand Nora accepte qu’elle est une victime et que Cam se lance dans l’enquête pour comprendre qui tire les ficelles. Natasha Friend réserve en effet quelques surprises à son lectorat tout en ajoutant des touches d’émotions au fil des chapitres afin de donner aussi un côté plus doux au récit et cela passe par les personnages principaux, ados comme adultes. Vraiment, l’ensemble est bien dosé et l’écriture, très fluide.

Ce que j’ai beaucoup aimé par ailleurs, c’est que l’autrice démontre bien le double standard : je prends position contre les violences sexuelles, bien sûr, mais si ça touche quelqu’un de mon entourage alors on peut peut-être l’aider, peut-être que ça ne s’est pas passé exactement comme ça a été dit, non ? Il y a plusieurs scènes de ce type et c’est très efficace chaque fois parce que c’est la réalité : on peut avoir des principes, mais quand ça nous touche de près, parfois, c’est compliqué de faire la part des choses. Oui, ça fait aussi en sorte qu’il y a quelques éléments du récit « un peu gros », mais ça permet de multiplier les points de vue et les histoires, ce qui renforce l’effet.

Le petit plus ? Il y a plein de petites phrases qui font écho au racisme et au sexisme ordinaire, ce qui permet de faire des petits rappels : on peut faire mieux que ça, groupe !

Livre acheté à la librairie Papyrus de Namur !