Dans la ville de Mortagne, mille deux cent dix-neuf âmes vivent en vase clos, divisées entre le travail des vignes et la scierie. Martial, lui, a voulu sortir de ce monde en allant à l’école à l’extérieur et ne revenant que la fin de semaine. D’ailleurs, chaque vendredi, le simple d’esprit du village l’attend sur le bord de la route et ensemble ils font la route, sans parler mais en développant une complicité. Ainsi, quand le frère de Martial se défoule sur ce fou du village avec son ami, l’adolescent perd le contrôle et ses instincts de violence refont surface. Le mariage de son frère deviendra le théâtre de sa réplique.
Roman noir très dur constitué de phrases très courtes et de petits paragraphes,
Je mourrai pas gibier est un concentré explosif qui ne laissera personne indifférent, ni les jeunes ni les vieux, mais s’adresse à un public averti étant donné la dureté
des propos. À noter qu’il est possible de lire le texte en roman ou dans son adaptation signée Alfred et dont les dessins sont d’Henri Meunier.
Mon avis
Comment dire… J’ai découvert ce livre en assistant à une table ronde sur la censure. Parce qu’il est dur, parce qu’il est violent, parce qu’il ne montre surtout aucun retour sur ce qui s’est passé de la part du personnage principal, donc aucun remords. Pourtant, si au Québec c’est un livre difficile à trouver, il est à l’étude dans plusieurs collèges français. Et je comprends pourquoi. Il y a l’histoire en elle-même, extrêmement riche, puis l’écriture. Un « Je » terriblement extérieur, un narrateur qui est un témoin dérangeant par ce qu’il ne ressent pas, par les mots sans fioriture qu’il utilise et qui nous ouvrent l’intérieur.
J’ai lu les deux versions. La bande dessinée et le roman. Je ne peux pas dire qu’une m’a plu plus qu’une autre puisque ce sont deux expériences totalement différentes. Je dirais que le livre permet de sentir davantage l’éloignement du personnage alors que la bd crée une ambiance autour des mots. Dans les deux cas, après le début brusque et dur, je me suis progressivement attachée à Martial, comprenant son besoin de fuir de Mortagne, son désarroi face à la violence des autres, son absence d'alternative... jusqu'à la fin, jusqu'à son choix, jusqu'à son indifférence qui, même après plusieurs relectures, me laissent sans mot, me paraissent impossibles à concevoir, me font peur.
À lire, vraiment, ne serait-ce que pour la réflexion qui en découle, sans parler de cette plume magnifique qu’est celle de Guillaume Guéraud.
Si vous avez aimé ce roman, vous pourriez être tenté par
Le coup de la girafe, un autre roman coup de poing.
Oui! Tout un roman! À chaque fois que je le relis, je suis estomaquée par sa puissance narrative. Une puissance narrative qui sert une histoire forte