Les maux d'Ambroise Bukowski

Lorsqu’Ambroise déménage dans une énième ville universitaire pour que sa mère, chargée de cours, puisse trouver un poste à temps plein, il tente de s’inventer une vie afin d’éviter de devenir un rejet, comme ce fut le cas dans les précédentes écoles qu’il a fréquentées. Ainsi, auprès des élèves il se dit riche, placé dans une école publique pour qu’il n’ait pas la grosse tête. Malheureusement, son sac banane rose et ses Reboek le dénoncent et certains élèves décident de mettre une arachide dans son sandwich,  certains que, comme pour sa richesse, sa soi-disant allergie mortelle n’est que du pipeau.

Alors qu’Ambroise passe bien près de la mort, sa mère déjà surprotectrice décide de le retirer de l’école et de l’inscrire à un programme de scolarité par correspondance, si bien qu’il se retrouve à avoir pour seule compagnie celle d’Irène ainsi que celle des propriétaires de leur logement, deux gentils Grecs dont le fils, Cosmo, vient tout juste de sortir de prison. L’homme de vingt-cinq ans effraie d’ailleurs beaucoup Ambroise, mais leur passion commune pour le Scrabble risque de changer les choses…

Les rebondissements sont nombreux dans ce court récit porté par l’humour bien particulier du personnage principal et rythmé par sa manie de décomposer les mots pour trouver toutes les possibilités qu’offrent les lettres, particulièrement quand le sujet abordé l’embarrasse. Entre roman d’initiation et récit d’aventures, Les maux d’Ambroise aborde le thème de la différence et des parents trop protecteurs dans une langue  accessible à tous.

Mon avis

« J’ai eu le temps de lire mon avis de décès avant que tout devienne noir : REJET TUÉ PAR UNE DEMI-ARACHIDE »

Coup de cœur pour ce court roman dont le personnage principal, un raté presque trop typé pour être vrai, a un sens de l’autodérision absolument délicieux. Ambroise n’a pas la langue dans sa poche et n’hésite pas à dire tout ce qui lui vient en tête, ce qui crée des situations rocambolesques, mais aussi des moments très touchants puisqu’à travers Ambroise, Susin Nielsen semble être capable de parler (et de rire parfois) de tout sans que cela crée de malaise. Pour cela, le club de Scrabble est un endroit riche en personnages atypiques et en situations loufoques et certains auraient pu devenir risibles, mais la magie de la plume de l’auteure sait plutôt les rendre attachants.

Personnellement, j’ai beaucoup aimé Ambroise, mais je suis aussi tombée éperdument amoureuse de Cosmo, et ce alors qu’il essayait encore de faire croire à Ambroise qu’il avait été mis en prison pour le meurtre d’un gamin. J’aime son humour parfois décapant et ses maladresses, j’aime surtout la place qu’il prend dans la vie de l’adolescent chétif qui est son voisin, lui offrant une figure masculine intéressante qui prend de l’ampleur au fil du récit. 

Côté histoire, justement, l’intrigue est très bien ficelée et, s’il n’y a pas de rebondissements extraordinaires, les péripéties de la vie d’Ambroise nous tiennent captifs, tout comme ses répliques, toujours croustillantes.

Seul bémol, le récit a été adapté à la sauce c québécoise, si bien qu’Ambroise parle du Village des Valeurs ou encore de Radio-Canada, mais quand sa mère échappe des sacres typiques, j’y ai moins cru, comme si c’était un peu plaqué sur le texte. Si la traduction ne m’a pas posé problème en général (chapeau pour les anagrammes), j’ai ici trouvé qu’on perdait le style de l’auteure.

En bref? Un personnage principal haut en couleur et rafraichissant dans une aventure rocambolesque, le tout avec pour décor l’univers déjanté, oui, oui, du Scrabble !

Si vous avez aimé, vous pourriez être tenté par Wonder ! 

Merci à la Courte échelle pour le roman!