La brute c'est Jocelyn. Élevé par une mère indifférente et un père qui le battait (jusqu'à ce que l'adolescent soit en âge de se défendre), celui qui a la carrure d'un géant est un asocial renommé qui vend sa protection auprès des plus faibles dans le seul but de faire de l'argent. La belle, c'est Marie-Noëlle, nouvelle à l'école secondaire du quartier et jeune fille dégourdie qui n'est pas intimidée par le physique imposant de Jocelyn. C'est d'ailleurs à côté de celui-ci qu'elle s'installe lors du premier cours de l'année et c'est à lui qu'elle propose de devenir son coéquipier. Entre les deux, l'amitié semble impossible, mais Marie-Noëlle persiste et Jocelyn s'habitue peu à peu à sa présence. Jusqu'au jour où elle lui demande à son tour sa protection et qu'il se doute que leur rencontre n'est peut-être pas le fruit du hasard...
La brute et la belle est un roman réaliste traitant du bagage familial, de la solitude, de relations humaines et de violence. Écrit sobrement et dans un langage accessible à tous, le livre pourra rejoindre les lecteurs intermédiaires et avancés.
J'étais un peu sceptique au départ, je dois l'avouer. Ma collaboratrice Sarah-Jeanne est tombée sous le charme d'Éric Godin avec Apprendre à compter, mais ne l'ayant pas lu, je rencontrais ici l'auteur pour la première fois et, ni le nom du personnage principal (difficile de croire qu'un adolescent s'appelle Jocelyn...) ni la couverture ne me donnaient vraiment envie de me lancer.
J'ai toutefois tenté ma chance et j'ai finalement apprécié mon expérience malgré qu'il m'ait fallu du temps pour me faire aux prénoms des personnages ainsi qu'à l'absence de références technologiques dans ce roman, ce qui semble le dater un peu et interpellera peut-être moins les adolescents qui se retrouvent presque tous greffés d'un téléphone cellulaire.
Il faut dire que l'intrigue principale est bien menée, d'abord parce qu'il est intéressant d'être du coté de la brute intimidatrice au départ. C'est rare que le lecteur puisse être du côté de celui qui est indifférent à la souffrance des autres ou qui, les plus mauvais jours, y prend plaisir. Le petit plus, c'est que Jocelyn est un être complexe et qu'on peut, sinon l'excuser, du moins le comprendre en voyant ce qu'il ressent et ce qu'il a vécu avec sa famille. D'ailleurs, si on comprend sa carapace, on se rend aussi rapidement compte que sa personnalité profonde est plus douce et on dirait qu'il tente souvent de se convaincre lui-même de la brute qu'il est. Au contact de Marie-Noëlle, on le découvre donc de plus en plus doux quand il apprend à faire confiance et se donne le droit de recevoir cet amour qu'il croyait lui être interdit.
Autre point positif, Éric Godin traite des thèmes plus lourds, violence familiale et abus sexuels entre autres, avec doigté. D'abord avec Jocelyn, puis avec Marie-Noëlle. Le tout est installé avec soin, si bien que la finale intense, avec une rencontre particulièrement violente qui vient bouleverser le fragile équilibre tout juste établi, est crédible. On évite en plus ainsi la fin trop positive qui aurait été incohérente avec le reste.
En bref? Un roman surprenant, pas nécessairement facile d'accès, mais qui est intéressant à découvrir.
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Très bon