Efi est consciente qu’elle est chanceuse. Au contraire de ses amies du village où elle a grandi, elle a pu aller au collège en ville, poursuivre ses études, aider son pays en devenant ingénieure et améliorer la vie des siens avec la technologie. Mais son retour chez elle pour les vacances ne se passe pas comme prévu. Les hommes de son clan n’ont plus pour elle les mêmes regards, la même insouciance. Et quand sa mère lui annonce que son père a décidé de la marier pour éponger les dettes de la famille en prévision de l’arrivée d’un nouveau bébé, maintenant qu’elle est nubile, le futur d’Efi s’effondre. Mais comment mettre une croix sur cet avenir en lequel elle a tant cru, comment accepter d’être vendue à un homme de 15 ans son ainé, qu’elle n’a jamais vu, de devoir quitter sa famille pour jouer le rôle d’une épouse soumise ? Les rêves d’Efi sont trop forts, mais le chemin vers la liberté est ardu…
Roman engagé qui met en lumière la condition féminine dans le monde, cette œuvre de Jo Witek dénonce la puissance des traditions, l’impact du manque de scolarisation et l’inégalité. Écrit dans une langue simple, constitué d’une suite de phrases courtes, il convient à tous les lecteurs.
Il y a une sensibilité palpable et une grande justesse dans ce récit dans lequel le fond s’associe à la forme. Ainsi, l’histoire est racontée à travers une suite de phrases courtes, souvent froides, comme le détachement de l’héroïne, nécessaire pour lui permettre de passer à travers chaque journée de ces « vacances » estivales qui signifient la fin de sa vie libre.
Si le pays dans lequel se trouve Efi n’est jamais nommé, c’est qu’elle pourrait se dérouler dans le monde entier, alors que les femmes sont encore soumises dans de nombreux pays au poids de la tradition, même malgré l’avancement des lois. En effet, par le biais de son héroïne, Jo Witek explique qu’il y a bien une loi qui interdit les mariages aux moins de 15 ans, mais elle montre aussi que la tradition est plus forte que tout, notamment dans les petits villages, là où les clans tirent leur puissance des yeux et des oreilles de chacun, là où aller contre ces mariages, c’est renoncer à revoir les siens à tout jamais (et encore faut-il réussir à fuir, ce qui n’est pas gagné).
Le petit plus ? Poignante, cette histoire fait aussi une belle place aux livres. Ceux-ci sont retirés à Efi pendant qu’elle attend son mariage, la famille de son fiancé ne désirant pas que de « mauvaises idées » lui viennent, et l’héroïne se réfugie dans la poésie d’Emily Dickinson, havre de paix, lors de scènes plus difficiles, comme sa nuit de noces. Comme quoi, la littérature est un outil d’apprentissage, d’émancipation, de liberté, mais aussi un refuge.
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