Annie qui a une trisomie 21 et est le rayon de soleil de sa famille, mais passe difficilement inaperçue ailleurs. À son travail, au magasin asiatique de Madame Chowa, dans les rues, dans les commerces, mais aussi et surtout dans son groupe de majorettes. Et quand Élodie, leur entraineuse, « pète un câble », comme le dit si bien Annie, demandant à la jeune fille de ne plus venir, c’est la catastrophe. Comment sa mère pourrait-elle annoncer à Annie qu’elle ne peut plus être un Joyau, et donc ne pas participer à la parade, comme elle le devait ? C’est de la grand-mère exubérante de la fratrie que vient l’idée de génie (enfin, de son point de vue à elle). Pourquoi ne pas former, eux, la famille, les proches, une équipe de majorettes pour entourer Annie ? Monter une chorégraphie, trouver un costume, enregistrer l’association, et pouf, magie ! Mais les écueils peuvent être nombreux dans un tel projet. Surtout que dans cette famille qui tourne autour d’Annie, mais ne communique pas, il y a plusieurs secrets... à potentiel explosif!
De nouveau, Émilie Chazerand offre à son lectorat un roman foisonnant, riche dans son humour, dans ses thématiques, dans ses émotions, déjanté, imprévisible ! Ponctué de dialogues au ton parfois acide, le roman s’adresse aux grands lecteurs !
J’ai vraiment eu beaucoup de plaisir à lire ce roman qui donne la parole à trois narrateurs faciles à distinguer. En effet, Émilie Chazerand a fait un super travail pour que leur façon de s’exprimer ressemble à ce qu’ils sont : Annie a plus de difficultés, butte sur les mots difficiles, utilise parfois une mauvaise syntaxe, mais fait aussi preuve d’une gentillesse constante et de beaucoup de candeur, donnant accès au lecteur à des souvenirs qui lui permettent de voir naitre des drames sans qu’elle-même s’en rende compte. De son côté, Velma est tout en délicatesse, en métaphores et en liste. Elle s’exprime par des phrases courtes, écrites les unes ou les autres, ce qui donne un aspect poétique au texte et explique son monde et son ressenti avec des images. Dans les premiers chapitres, on la voit en marge des autres d’abord, et on comprend beaucoup de choses à son propos sans que rien ne soit dit franchement, comme si elle était cachée entre les lignes comme elle se planque dans la vie. Finalement, Harold est celui qui utilise une narration plus traditionnelle. Il est celui qui rend les dialogues les plus frappants, qui se heurte à la vie constamment. Parce qu’il dissimule aussi deux secrets immenses qui risquent de tout bouffer. Le passage régulier entre les uns et les autres donne du rythme à ce texte qui est dynamique en soi avec tous ces personnages qui sont absolument… vivants.
Par ailleurs, fait rare en littérature jeunesse, les narrateurs font aussi une large part aux ressentis et aux débats des adultes. La mère ultra protectrice qui s’est délaissée elle-même et oublie parfois de s’occuper de son ainé et de sa cadette malgré toute sa bonne volonté, le père qui a caché Annie et refuse aux deux autres de sortir des moules traditionnels et la grand-mère (mon personnage préféré) qui dit tout haut bon nombre de choses (qui n’aurait pas forcément eu besoin d’être dites), qui se montre forte, voire impitoyable, mais qui tait aussi un secret.
La quatrième de couverture semble plus indiquer que l’histoire tournera autour des majorettes et du nouveau groupe qui se forme, mais s’il y a ça (parce que oui, rassurez-vous, il y a ça, avec entrainement, paillettes et fous rires), c’est aussi et surtout une histoire qui vise le cœur et qui montre une famille qui se cherche et qui est parfois un peu éblouit par Annie, son soleil, mais qui a besoin de se retrouver. Touchant.
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