Entrevue avec Simon Boulerice

 
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10 mai 2011

J'ai entendu parler du collectif Être un héros dans les journaux et j'ai tout de suite été attirée par ce recueil de nouvelles visant d'abord un public masculin mais qui, par la force des choses, rejoint aussi les filles. Ne sommes nous pas toutes curieuses de ce qui se passe dans la tête des hommes? 

La lecture m'a ravie et j'ai particulièrement accrochée à une nouvelle, Ce que m'a fait Mariah Carey, pour l'écriture et l'intrigue, mais aussi pour les découvertes musicales qu'elle propose. Voici donc une entrevue avec son auteur, Simon Boulerice! 

Qu'est-ce qui vous a amené à participer au collectif Être un héros?
 
C'est Geneviève Thibault, une brillante jeune femme, qui dirigeait ce collectif. Elle avait lu mon premier roman, Les Jérémiades, et m'a simplement demandé de me joindre à l'équipe. Je ne me suis pas fait prier très longtemps. J'ai dit OUI.
 
Est-ce plus facile ou plus difficile de publier dans un collectif que d'assumer seul une oeuvre?

Excellente question. C'est mon premier collectif, et je n'ai à ce jour publié qu'un seul roman. Je peux difficilement risquer une réponse. Mais je vais tenter quelque chose : il me semble que c'est peut-être un peu plus facile, car la réussite, au même titre que l'échec potentiel incombe à tous, plutôt qu'à nous seul. J'y répondrai plus sérieusement quand j'aurai plusieurs publications à mon actif.

Avez-vous eu de la difficulté à retrouver votre coeur d'adolescent?

Pas du tout. En fait, je ne pense pas l'avoir jamais perdu.

Qu'est-ce qui vous a inspiré l'histoire de Yann? Y a-t-il une partie que vous avez déjà vécue?

Je n'ai pas précisément vécu ça, mais ce sentiment-là, oui, je le connais. Je l'ai connu, disons. Avoir honte de ce que l'on aime, j'ai connu ça longtemps. On ne choisit pas ce qui nous émeut. On est ému, c'est tout. Ce n'est pas rationnel. Moi, ado, j'étais plus bouleversé par les chansons de Lara Fabian que celles de Jacques Brel. C'était comme ça. Je n'y pouvais rien. En vieillissant, mes goûts se sont peut-être plus affinés, mais quand j'entends Si tu m'aimes ou Tu t'en vas à la radio, je l'écoute avec un réel bonheur. L'idée est d'apprendre à faire la paix avec ça. Oui : l'idée est de faire la paix avec la petite Mariah Carey en nous, et l'assumer tant que faire se peut, disons.

Est-ce que vous gardez de bons souvenirs de votre adolescence?

Je carbure à mon enfance. Quand j'écris, c'est souvent chargé de ce que j'ai vécu enfant et adolescent. Ce ne sont pas exclusivement de beaux souvenirs, loin de là, en fait, mais avec le recul, je ne changerais rien de ces années. Je suis ce que je suis aujourd'hui à la lumière de l'adolescence que j'ai vécue.

Étiez-vous un grand lecteur à l'adolescence? Et maintenant?

Pas du tout. Je lisais peu. Mais j'adorais les livres. J'aimais les toucher, j'aimais l'odeur du papier. Les livres neufs comme ceux usagés. J'aimais surtout les posséder, les classer sur mes étagères. Les savoir là, à portée de main, le jour où j'aurai la patience de les lire.
Aujourd'hui, je lis davantage. Je lis à tous les jours, en fait. Dans les transports à commun et dans mon lit, surtout. J'alterne toujours entre quatre ou cinq livres que je lis de front, selon mes envies. C'est comme quand j'écris, je suis incapable de me consacrer à une seule chose. Je suis de nature éparpillée, je sais.
 
Qu'est-ce qui, ou qui, vous a amené à la lecture?

À 9 ans, ma professeur de 4e année m'a signalé que j'écrivais bien. Elle parlait de ma calligraphie, mais je croyais qu'elle parlait de mon style. Je me suis donc appliqué (et presque acharné) à lui donner raison. J'ai donc décidé à 9 ans que j'allais devenir écrivain, alors que tout découlait d'un quiproquo. J'écrivais beaucoup, mais lisais peu, par contre. Je me sentais coupable et imposteur de lire si peu. Alors je me suis mis à la lecture par culpabilité, surtout. La culpabilité d'être un auteur qui ne lisait pas.

Est-ce difficile d'écrire pour un public adolescent?

Non, pas selon moi. Suffit de se replonger dans cette fragilité-là. Et d'être honnête. Attention : on peut être honnête en racontant des histoires fantastiques. En fait, peu importe le genre qui nous allume, il faut écrire avec intégrité, en évitant d'être racoleur ou de chercher à plaire à tous prix. Le lecteur adolescent le sent quand ce n'est pas intègre. C'est mon avis, du moins.

Y a-t-il des thèmes que vous n'aborderiez jamais dans un roman jeunesse? Pourquoi?

Non. Tous les thèmes sont intéressants, ou susceptibles de l'être plutôt. Tout est dans le traitement. Certains thèmes exigent plus de respect, de doigté. On peut parler de sujets très sombres, mais pour moi, il faut impérativement qu'il y ait de la lumière. C'est une obligation, quand on écrit pour les jeunes.

Puisque la nouvelle amène le lecteur à découvrir plusieurs nouveaux artistes, questionnaire musical !

Quelle est votre découverte du moment?

J'en ai deux. D'abord, le groupe torontois Austra, surtout pour leur magnifique reprise de la chanson Crying de Roy Orbison. Puis, le groupe américain Citizen Cope et leur puissante Let the drummer kick. Bon, je m'en veux présentement, je n'ai pas nommé de groupes francophones.

Quelle est la chanson à écouter pour se mettre dans l'ambiance de Ce que Mariah Carey a fait de moi ?
Rien de mieux que d'écouter la chanson All I want for Christmas is you de Mariah. Comment résister au tintement des clochettes du début?

Quelle est, entre toutes, votre chanson préférée?

Hope there's someone 
d'Antony and the Johnsons. C'est la chanson qui me donne le plus de frissons. Et quand j'écoute de la musique, le degré de poil hérissé, c'est mon baromètre.

Rafale lecture !

Quel est votre livre préféré?

Incapable de n'en nommer qu'un.
Tous les romans de Michael Delisle, pour son empathie, qualité suprême de l'homme. Le Désarroi du matelot tout particulièrement.
La Promesse de l'aube de Romain Gary pour la force de l'amour maternel, et Ta maison est en feu de Margaret Laurence pour les ambigüités de cet amour. La Détresse et l'enchantement  de Gabrielle Roy  et La Bâtarde de Violette Leduc pour leur honnêteté respective.

Quel roman a marqué votre adolescence?

Ado, le peu que je lisais était surtout les livres Frissons que s'achetaient ma soeur et les romans policiers de la série Le Manchot, écrits par Pierre Saurel (nom de plume de l'acteur Pierre Daigneault), que mes parents conservaient pieusement dans leur bibliothèque. Sinon, un livre qui a marqué ma jeune adolescence serait La vie au Max, de Suzanne Julien, paru aux Éditions Pierre Tisseyre.

Cela dit, un livre majeur lu vers mes 15 ans : Bonheur d'occasion de Gabrielle Roy. C'est la première fois que je comprenais tout d'une histoire brillamment écrite. Je précise que la même année, j'avais tenté de lire le début de Phèdre de Racine, et je croyais que Phèdre était un homme. J'étais légèrement dans le champ, disons.

Quel est le livre sur votre table de chevet?
 
Présentement, c'est le très émouvant La Messe anniversaire d'Olivier Adam.
 
Dans quel endroit préférez-vous lire?

Le métro. Je lis mieux dans les endroits animés. Lire seul chez moi, ça ne m'excite pas beaucoup.

Quel est le livre que vous aimez beaucoup, mais que vous avez un peu honte de révéler?

Contrairement au protagoniste de ma nouvelle, j'éprouve rarement de la honte à aimer ce que j'aime. Ce qui pourrait être honteux par contre : à la bibliothèque, j'adore emprunter des biographies de gens importants ou des livres d'histoires...qui s'adressent à un lectorat enfant. J'aime ce qui est simplifié, et vulgarisé intelligemment. Et dans ce type de livre, je me sens rarement complexé de ne pas tout comprendre.

Avez-vous une suggestion de lecture pour ceux qui ont adoré Ce que Mariah Carey a fait de moi?

J'ai découvert cette année les romans jeunesses de Thomas Gornet, parus à l'École des loisirs. Ce sont des histoires pleines d'humour et de sensibilité. Je sens -j'ose l'affirmer, car on me l'a déjà signalé- une certaine parenté entre Thomas et moi. C'est peut-être au niveau de notre tendresse et de notre honnêteté? Je ne sais pas.
Vous avez trouvé une faute ? Oui, j'en laisse parfois passer. N'hésitez pas à me la signaler à sophiefaitparfoisdesfautes@sophielit.ca et je la corrigerai ! Merci et bonne lecture ! :-)
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**thomas (22.06.12 à 20 h 51)

Merci Simon! C'est un honneur que d'être comparé à ton écriture...

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