Entrevue avec Marc-André Pilon

 
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24 février 2011

J'ai rencontré Marc-André Pilon, l'auteur de La revanche du myope, au Salon du Livre Jeunesse de Longueuil au mois de février 2011 (il a d'ailleurs inspiré la coupe de cheveux du personnage de l'auteur dans la bd à ce sujet...) et je lui ai proposé de faire une entrevue afin de parler de son roman et de son nouveau statut d'auteur. En voici le résultat!

Qu'est-ce qui a fait que vous ayez eu envie d'écrire La revanche du myope?

J'avais envie de me replonger au début de mon adolescence, au moment où la chenille est devenue papillon, en quelque sorte. Ça et le fait que j'avais donné comme projet à mes élèves d'écrire un début de roman (j'enseigne le français au secondaire à la Cité-des-Jeunes de Vaudreuil-Dorion). Devant leur enthousiasme et leur créativité, ça m'a donné le goût de m'investir également dans l'aventure de l'écriture (maintenant que je ne jouais plus de la batterie dans aucun groupe de musique depuis quelques mois et que j'avais ce vide artistique à combler).

Combien de temps a duré l'écriture du roman?

La première fois que j'ai écrit un bout de texte ayant pour titre « La revanche du myope » remonte à environ 7-8 ans. Après 5 pages, j'avais remisé le tout dans un tiroir. Quand j'ai finalement décidé de suivre mes propres conseils que je donne aux élèves (faire un schéma narratif, penser au destinataire...), ça a vraiment débloqué (comme quoi les profs ne racontent pas toujours n'importe quoi...!). Ensuite, c'était facile. En 6 mois, tout en continuant à travailler à temps plein, c'était réglé. 

Est-ce que vous avez écrit facilement ou c'est un processus difficile?

Écrire la première version n'est pas si mal. Ce qui est ardu est de faire les bons choix pour que le récit ne soit jamais ennuyant pour le lecteur, que le rythme soit constamment maintenu. C'est la recherche de cette fluidité qui est le plus difficile. Je voulais écrire un roman qu'on veut lire de la première à la dernière page dans la même journée. À vous maintenant de me dire si le pari est relevé ;) 

Avez-vous un but en écrivant cette histoire?

Mon but premier était de faire rire. J'espère que c'est réussi! :P 
Sinon, les sujets abordés (par exemple, l'intimidation) venaient naturellement avec le personnage choisi (un nerd de 13 ans dans une école), ce n'était donc pas un but en soi. Toutefois, si ça peut toucher certaines personnes, leur montrer qu'ils ne sont pas seuls dans leur situation, j'en serai ravi.

Est-ce que le travail après l'écriture, avec la maison d'édition, a été ardue? Pourquoi?

Je dirais plus « long » que « ardue ». C'est mon premier roman et j'avais besoin de ce regard extérieur pour polir mon manuscrit. Les Éditions de Mortagne sont de vrais professionnels et ils savent exactement où ils s'en vont. Mon histoire s'en est trouvée grandement améliorée. C'est sûr qu'il a fallu faire quelques sacrifices (certaines blagues ou références qui étaient trop « adultes »), mais c'était pour le bien de l'oeuvre dans son ensemble. 

Quelle part d'autobiographie y a-t-il dans ce roman?

Une grande part! C'est sûr que je ne suis jamais parti à la recherche d'une prof disparue, mais le nerd avec les grosses lunettes, la coupe champignon et les dents de la mort, c'est un peu moi à cet âge... En fait, le premier 5 pages que j'ai mentionné plus tôt était entièrement autobiographique et portait sur mes déboires amoureux de l'époque, quand je n'avais aucune chance avec les filles en raison de mon apparence. Comme c'était un sujet un peu limité, j'ai greffé l'intrigue policière à cette prémisse de base. Certains éléments de la vraie vie sont tout de même restés dans le roman final. Par exemple, sans vouloir révéler de « punch », le défi du chapitre 9 et la lettre du chapitre 11 me sont réellement arrivés.

D'où vous est venue l'inspiration pour l'histoire de la disparition de la prof dans La revanche du myope?
Je me suis dit: qui n'a jamais rêvé de voir un prof disparaître? Et si c'était le contraire? Si c'était la prof qu'on ne voulait pas qui disparaisse? Partirait-on à sa recherche? Surtout que le personnage principal est un nerd, lesquels ne sont pas réputés pour faire comme tout le monde dans une école. Alors, voilà un peu comment est née l'idée afin de créer du suspense dans mon récit.

Qui sont vos lecteurs? Qui aimeriez-vous voir lire ce livre?

J'ai écrit le livre en pensant aux gars de 12-13 ans qui ne lisent pas souvent et qui voudraient une aventure rythmée et humoristique. En même temps, mes premiers lecteurs ont été les adultes de mon entourage et ils se sont bien amusés en le lisant, en raison des jeux de mot et tout. Depuis que le livre est sorti (deux semaines au moment d'écrire ces lignes), on en vend beaucoup aux filles et à de bons lecteurs de 9 ans et plus. Alors, en gros, je dirais que tous semblent y trouver leur compte. J'invite donc tout le monde à y jeter un coup d'oeil! Plus on est des fous, plus on lit :) 

D'où vient l'inspiration pour les noms des personnages? 

Pour le nom du personnage principal (Pierre-Antoine Gravel-Laroche), je me suis inspiré d'une blague entourant le nom de famille de deux de mes collègues de travail qui auraient pu donner à leur enfant un nom composé lourd à porter (c'était aussi un hommage à un ami d'enfance, Marc-André Gravel, à qui j'ai d'ailleurs dédié le livre). Cette idée a tracé la voie pour le reste : je voulais me moquer un peu des noms composés impossibles que certaines personnes ont et définir les personnages avec cela. Ainsi, celui qui est toujours malade s'appelle Morand-Voyer; l'exhibitionniste, Courtemanche-Allaire; le suicidaire, Jetté-Dupont; la belle fille, Larose-Deschamps; le gros qui se pense « tough », Leboeuf-Hâché, etc.

Est-ce que vous faites des jeux de mots à répétition dans la vie réelle aussi?

Un peu (au grand désarroi de ma blonde!) 

Que conseillez-vous à ceux qui se reconnaissent dans le souffre-douleur du livre?

Je leur dirais qu'il est important de se trouver une passion. À travers celle-ci, ils pourront peut-être se trouver un point d'ancrage et augmenter leur confiance en eux. Ça va aussi leur permettre de rencontrer de nouvelles personnes, de se faire des amis qu'ils n'auraient pas nécessairement eus en se basant uniquement sur l'apparence. Pour moi, ça a été la musique (j'ai commencé à jouer de la batterie à 12 ans) et le théâtre (grâce à une option que j'ai prise en secondaire 3). À travers ces expressions artistiques, j'ai trouvé un moyen de m'exprimer, retirant ainsi le goût aux autres de me considérer comme un souffre-douleur.

Que conseillez-vous à ceux qui se reconnaissent dans le personnage du dur à cuire? 

Bonne question. Premièrement, je me demanderais si, comme le personnage du livre, ils ne sont pas d'anciennes victimes devenues bourreau. Si oui, pourquoi faire subir aux autres ce qu'on ne voulait pas subir soi-même? Si non, d'où vient ce désir de supériorité? Intimider quelqu'un est pour moi un signe de faiblesse. Je leur conseillerais donc de trouver d'autres moyens d'exprimer leur faible estime d'eux-mêmes afin qu'ils se sortent, eux aussi, de ce triste cercle vicieux.

Est-ce que d'après vous il faut être un gros lecteur pour être un bon auteur?

Je ne pourrais parler au nom de tous mais, pour ma part, c'est sûr que ça m'a beaucoup aidé. Pour trouver le ton, le rythme, éviter certains pièges de narration, avoir lu beaucoup d'exemples aide grandement. J'ajouterais qu'il ne s'agit pas seulement de lire beaucoup, mais aussi de ne pas avoir peur de lire les classiques. Regarder ce que les grands ont fait (Hugo, Zola, Tolstoï, Dostoïevski, etc.) et ce qu'il se fait d'exceptionnel encore aujourd'hui (Milan Kundera, par exemple) ne peut pas nous nuire, c'est sûr. Même quand on écrit un livre jeunesse ;)

Quels sont vos conseils à ceux qui écrivent mais qui ont peur de ne pas être bons?

D'avoir la patience de ne pas lâcher. La première version est toujours nulle. Il s'agit d'y mettre l'effort et les sacrifices nécessaires pour que ça devienne bon pour le lecteur. Je crois que c'est à la portée de bien plus de gens qu'on ne le pense.

Si vous gagnez un Oscar pour la meilleure adaptation de roman, à qui allez-vous le dédier?

Ça va dépendre de qui aura eu le courage de produire et de réaliser un film avec mon histoire ;)


Rafale lecture !

Quel est votre livre préféré?

Ça change souvent. Pour l'instant, je dirais L'Insoutenable légèreté de l'être de Milan Kundera.

Quel roman a marqué votre adolescence?

« Ça » de Stephen King. 

Quel est le livre sur votre table de chevet?

Aujourd'hui : Illusions perdues de Balzac.

Dans quel endroit préférez-vous lire?

Au lit (avec plein de cochonneries à grignoter... :P )

Quel est le livre que vous aimez beaucoup mais que vous avez un peu honte de révéler?

Je n'ai pas tellement honte des livres que j'aime :P 
Avoir à nommer des titres, je dirais peut-être les romans de paralittérature (science-fiction, suspense) de Dean R. Koontz, que j'aimais beaucoup adolescent et qui gardent toujours une bonne place dans mon coeur (« Chasse à mort », « Les Yeux foudroyés », « Le Temps paralysé », etc.).

Avez-vous une suggestion de lecture pour ceux qui ont adoré votre lire? 

Je leur conseillerais la série du Raisin de Raymond Plante, quatre petits livres jeunesse qui m'ont beaucoup plu quand j'étais jeune et qui ont influencé, d'une certaine façon, l'écriture de mon roman (les quatre tomes viennent d'ailleurs d'être réédités en un seul chez Boréal sous le titre « L'intégrale des Raisins »).

Bonne lecture à tous et merci beaucoup à sophielit.ca pour cette entrevue!


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