Entrevue avec Bertrand Puard

 
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28 juin 2012

Je suis tombée sur Les effacés en librairie et je me suis tout de suite sentie interpelée par la couverture et l'histoire. Un thriller médico-politique? Et pourquoi pas! Puis j'ai dévoré ce premier livre (et je vais bientôt me jeter dans le deuxième de la série) et j'ai eu envie d'en savoir un peu plus sur son auteur, un écrivain prolifique! Entrevue avec Bertrand Puard! 

Vous écrivez plus pour les adultes que pour les adolescents. Qu’est-ce qui change dans votre écriture pour les plus jeunes? Qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire pour ce public?
 
Je n’ai pas l’impression de changer ma façon d’écrire, mon style, lorsque j’écris pour les plus jeunes. C’est surtout au niveau de l’histoire, du scénario, que la différence se fait. Sur l’écriture en elle-même, je ne m’interdis rien et je ne recule jamais, par exemple, devant un mot un peu soutenu sous prétexte que le public adolescent ne le connaîtrait pas. Au contraire ! Je pense que les ados sont très attentifs à l’écriture et c’est d’ailleurs une de mes grandes fiertés sur les deux premiers tomes : les commentaires de mes lecteurs sur la qualité du texte, des phrases. Ensuite, pour répondre à votre seconde question, c’est une envie qui date de très longtemps. Vers 12 ans, beaucoup de jeunes lecteurs décrochent des livres (surtout les garçons!) pour se diriger vers d’autres médias. Je relève le défi de prouver à tous ces jeunes en rupture qu’un livre peut être aussi vif et prenant qu’un film ou un jeu vidéo. Et puis le public adolescent est un public exceptionnel pour un auteur, car très enthousiaste, pouvant s’enflammer pour votre livre, vos personnages…  Et c’est un plaisir de partager cela avec eux!
 
Il me semble que vous écrivez aussi sous deux pseudonymes. Pourquoi cette multiplication des identités? Qu’est-ce que chacun vousapporte ou vous permet de différent?
 
J’ai écrit sous pseudonyme à mes débuts, mais je ne le fais plus à présent. A l’époque, il s’agissait de ne pas mélanger les genres entre l’énigme classique et le pur thriller. Et c’était une demande de mon éditeur qui ne voulait pas déstabiliser mes lecteurs.
 
Est-ce que vous vous documentez beaucoup avant d’écrire? Est-ce que l’actualité vous inspire?
 
Oui, la documentation est une part importante de mon travail, surtout pour une série comme les Effacés qui se propose, à chaque volume, d’explorer les zones d’ombre d’un milieu en particulier : les laboratoires pharmaceutiques dans Toxicité maximale (T1) et les marchés financiers dans Krach ultime (T2). Le foot-business sera le sujet du tome 3. L’actualité est, dès lors, une source d’inspiration permanente. Pour Toxicité maximale par exemple, deux sujets m’avaient frappé : le fait que le virus potentiellement le plus mortel pour l’homme ait été créé dans un laboratoire par un groupe de chercheurs, et la fameuse campagne de vaccination française contre le virus H5N1 voilà quelques années où l’État avait acheté auprès de plusieurs laboratoires des dizaines de millions de doses de vaccins… qui n’ont jamais été utilisées et qui sont arrivées cette année à échéance…
 
Écrivez-vous plusieurs romans en même temps? 
 
Je serais bien incapable de composer deux ouvrages en même temps. Mais cela ne m’empêche pas de faire cohabiter dans mon esprit une multitude d’idées à la fois! Je crois que c’est un peu le propre des écrivains de l’imaginaire…
 
Est-ce important pour vous que vos histoires se déroulent en France?
 
Oui, c’est important, même si, comme vous l’avez remarqué, je fais toujours un petit détour à l’étranger. C’est d’ailleurs une de mes grandes satisfactions sur cette série : le retour des jeunes lecteurs qui me disent « Enfin une série d’aventures qui se passe au coin de notre rue! ». Si un auteur français ne le fait pas, qui va le faire alors! Bon nombre de mes confrères français se croient obligés de situer leurs thrillers aux États-Unis, ce que je trouve triste, et, entre nous, un peu facile.

Pourquoi avoir utilisé les  Îles-de-la-Madeleine dans le premier tome comme point d’ancrage d’Amadieu?

Eh bien c’est tout simplement parce que j’aime beaucoup votre pays. La gentillesse des « cousins » d’outre-Atlantique et leurs paysages splendides, infinis, qui me ressourcent à chacune de mes visites. D’ailleurs, j’espère vivement venir bientôt pour signer ma série à Montréal et Québec!

Comment est née l’histoire des Effacés?

Ce n’est pas toujours évident d’expliquer la genèse d’une idée, car c’est une foule de petites choses qui peut me conduire à une belle idée. Pour Les Effacés, il y a tout de même un élément fondateur : une discussion avec un patron en retraite de la DGSE, l’ancien service de renseignement extérieur de la France, le patron de « nos » James Bond… Il m’a confié qu’il envoyait souvent des rapports au Président de la République de l’époque, des rapports sur des sujets divers, le trafic de drogue, la corruption financière, etc. Et que, parfois, le Président soulignait le nom d’une personne dans un rapport et inscrivait, dans la marge du document, « à traiter ». Ce qui signifiait qu’il donnait l’ordre aux services secrets de supprimer cette personne, souvent peu recommandable.

Comment sont les nés les différents protagonistes? Les adolescents semblent avoir un bel équilibre entre eux. Était-ce voulu de balancer les forces? Et ce Nicolas Mandragore qui est si mystérieux, le connaissez-vous déjà complètement ou risque-t-il de vous surprendre vous-même?
 
J’ai essayé en effet de construire les cinq Effacés de telle façon qu’ils se complètent dans bien des domaines… et que leurs joutes (oratoires, notamment) soient riches pour les lecteurs! En ce qui concerne Mandragore, je connais son passé et son futur, à la différence des Effacés et de mes lecteurs… Ce qui ne m’empêche pas d’être parfois surpris par le personnage comme vous l’avez très justement remarqué dans votre question… Il se complexifie au fil de la plume et c’est un réel bonheur de composer un tel personnage…

Est-ce que le roman a beaucoup changé entre sa première version et celle que tous peuvent maintenant tenir entre leurs mains?

Un roman n’est jamais vraiment terminé. Je passe tout d’abord mon premier jet au scanner avant de le rendre à mes éditrices. Et ensuite, nous discutons du texte en confiance. Lorsqu’il part à l’imprimerie, c’est toujours un moment un peu particulier.

Prévoyez-vous une longue série?

Nous prévoyons une première série de cinq tomes, un premier cycle qui apportera toutes les réponses aux mystères posés (l’identité de Mandragore, le lien entre les Effacés, etc.). Et si le succès est au rendez-vous, ce qui semble déjà être le cas!, j’espère bien pouvoir lancer un second cycle, différent du premier, avec de nouveaux personnages, de nouveaux lieux et de nouvelles intrigues.

Qu’est-ce que vous préférez du processus d’écriture? Qu’est-ce que vous aimez le moins?

J’aime tout dans l’écriture. Tout! De la conception du livre, de la petite idée de départ qui germe aux dernières corrections qu’il faut apposer avant le départ à l’imprimerie. Écrire est un métier, mais c’est avant tout un plaisir.
 
Rafale lecture !

Enfant, étiez-vous un grand lecteur?

Un lecteur compulsif, même! Je devais toujours avoir un livre avec moi…
   
Qui vous a donné le goût de lire?

Je ne crois pas pouvoir dire qu’il s’agit d’une personne. Les livres se sont plutôt imposés à moi par la force de ce qu’ils contiennent. Je n’ai jamais su résister à l’appel d’une bibliothèque et de l’odeur si caractéristique des jeunes et des vieux papiers…
 
Quel mot décrit le mieux votre relation avec les livres?

Passionnel. Sartre, dans son essai « Qu’est ce que la littérature » écrivait « le monde peut se passer de la littérature. Mais il peut se passer de l’homme encore mieux ». Je le rejoins et je fais mienne sa sublime phrase.

Quel est votre livre préféré?

La série des Rougon-Macquart de Zola.  A chaque roman, un milieu, des personnages qui se croisent, s’entrecroisent, évoluent d’opus en opus… Un exemple, un summum pour un romancier démiurge !
 
Quel roman a marqué votre adolescence?
 
Ils sont nombreux, mais je citerais Le Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas (et d’Auguste Maquet !), un modèle du roman d’aventures, qui mélange les genres, un régal !

Quel est le livre sur votre table de chevet?
 
Daddy de Loup Durand, un chef d’œuvre sur le thème de l’enfant précoce. Un roman méconnu, plus édité à ce jour, qui m’avait profondément marqué à douze ans, et que je relis au moins une fois par an…

Dans quel endroit préférez-vous lire?
 
Partout. Mais le mieux serait sur une île déserte, un endroit où on ne pourrait faire que cela, où la réalité ne vous rattraperait, jamais, jamais…

Si vous étiez un livre, lequel seriez-vous? 

A la Recherche du Temps perdu, de Proust. Comme cela, je serai parfait !

Avez-vous une suggestion de lecture pour ceux qui aiment la série des Effacés?

Le Comte de Monte-Cristo et Daddy. Les lecteurs curieux comprendront alors beaucoup de l’architecture générale de la série…
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